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1939, l’accueil de la République espagnole

Mis à jour le par Olivier Vilain
Dès 1935, le Secours populaire de France et des colonies crée le « comité d’aide aux réfugiés espagnols ». Dans les camps en France, il construit des installations sanitaires et des écoles. Le SPF a été à l'avant-garde de l'aide à l'Espagne républicaine.

Il y a 80 ans, Franco mettait la main sur la totalité de l’Espagne. Pour fuir son régime fasciste, 500 000 Républicains se sont exilés de l’autre côté des Pyrénées, après la chute de Barcelone, dernier bastion tenu par le gouvernement légitime. En février 1939, ces fugitifs affrontent le froid et la faim pour se réfugier dans le sud-ouest de la France. C’est la Retirada, la retraite. Leurs descendants y vivent toujours.

Les militants du Secours populaire de France et des colonies, ancêtre du Secours populaire, se préoccupent d’accueillir les réfugiés et de faire vivre le droit d’asile. Ils se mobilisaient déjà pour ceux qui fuyaient les régimes dictatoriaux d’Europe centrale et du sud. De Toulouse à Marseille, en passant par Céret ou Perpignan, le mot d’ordre en 1939 est « avec les réfugiés de Catalogne ». L’accueil est en place depuis les premiers combats. Dès octobre 1936, les bénévoles accueillent dans le Périgord 400 premiers réfugiés.

Scènes navrantes de l’exode du peuple espagnol préférant l’exil à la servitude. Que notre hospitalité traditionnelle soit égale à elle-même en ces circonstances douloureuses ! Ouvrons toutes grandes nos portes à ces victimes de la terreur fasciste !

                                                                                                                  — La Défense, le journal du Secours populaire (février 1939)

A leur arrivée, ces hommes, ces femmes et ces enfants, totalement démunis, ne sont pas toujours bien accueillis. La bourgeoisie de l’époque, en émoi devant la contestation de son pouvoir de la part des catégories populaire, préfère souvent « Hitler au Front populaire », empêchant la France d’être pour les Espagnols « la République sœur » espérée.

Un accueil très dur des autorités

Dans le fond, les classes dirigeantes ne voient pas d’un bon œil l’arrivée de ces « rouges », de ces « anarchistes » qui ont soutenu armes à la main le Frente popular (alliance des partis de gauche, dont l’arrivée au pouvoir précède de quelques mois celle du Front populaire français), comme le martèle la presse de droite de l’époque, qui n’hésite pas à agiter le mythe de « l’homme au couteau entre les dents ».

La Défense archives du SPF, en ligne sur Gallica

La Défense archives du SPF, en ligne sur Gallica.

Avant même la Retirada, le gouvernement Daladier, dès novembre 1938, édicte plusieurs décrets-lois prévoyant l’internement administratif des « étrangers indésirables », susceptibles de troubler l’ordre public et la sécurité nationale. (Cette décision ciblait initialement les réfugiés d’Europe centrale et du sud qui fuyaient les régimes totalitaires comme le nazisme). Dès mars 1939, le gouvernement français reconnaitra l’Espagne de Franco, envoyant le maréchal Pétain comme ambassadeur à Madrid.

Des camps d’internement

Les réfugiés sont séparés. Les hommes sont cantonnés dans des camps d’internements Les premières semaines, ils dorment à même le sable ou la terre, sans rien pour s’abriter. « Les décès sont réguliers en raison du manque d’hygiène et des difficultés d’approvisionnement en eau potable et en nourriture, note le Musée de l’histoire et de l’immigration. Les conditions de surveillance sont drastiques et assurées par les troupes militaires, tirailleurs sénégalais, spahis ou garde républicaine mobile. »

La Défense archives du SPF, en ligne sur Gallica

La Défense archives du SPF, en ligne sur Gallica.

Dans ce contexte, l’accueil dépend de la mobilisation des populations locales. Des hommes et des femmes de bonne volonté se mobilisent, dont les militants du Secours populaire de France et des colonies, ancêtre du Secours populaire. Ils étaient sensibilisés avant même le début du putsch, en 1936. A partir d’août 1937, le Secours populaire ajoute à sa campagne la protestation contre les conditions « intolérables » faites aux réfugiés dans certains camps d’internement frontaliers (baraquements non construits, camps entourés de fils barbelés, journalistes écartés, brutalisés diverses, etc.).

L’engagement des militants

Les militants populaires multiplient les « semaines de collecte », les journées de collectage, les souscriptions nationales « pain-lait-santé », l’envoi de bateaux et les convois de camions chargés de lait pour les enfants, de vivres, de vêtements, de tabac, pansements, etc. En 1937, une « journée nationale pour l’enfance espagnole » est même organisée entre plusieurs actions de sensibilisation, dans les villes comme dans les campagnes, sur le sort des Républicains. C’est ce que montre, avant même la Retirada,  le film tourné à la demande de l’association par le photographe Henri Cartier-Bresson, « L’Espagne vivra ».

Venant d’un pays où la moitié des terres appartenait à une poignée de familles et où « 4 millions de paysans ne possédaient rien », les réfugiés n’étaient en fait coupables d’avoir voulu une société égalitaire et plus fraternelle.

Affiche du Secours populaire de France et des colonies 1946 conservée à la National library of congress, Etats unis d’Amérique

Affiche du Secours populaire de France et des colonies 1946 conservée à la National library of congress, Etats unis d’Amérique.

 


Faire vivre le droit d’asile, porter assistance

Le soutien du Secours populaire au peuple espagnol continue durant toute la dictature franquiste, à travers notamment la remise de colis aux prisonniers politiques. Depuis, l’association continue ses actions auprès des réfugiés et des migrants en France et dans le monde (voir le diaporama).

Plus de 120 000 sont arrivés en Europe en 2018, selon les chiffres publiés par le Haut-Commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR), le 3 janvier. Près de 2 300 personnes sont mortes en tentant de traverser la Méditerranée l’année dernière.

Depuis plus de 15 ans, les bénévoles du Secours populaire agissent à Calais et ailleurs auprès des migrants-réfugiés, notamment syriens ou irakiens, apportant un soutien moral et matériel (aide vestimentaire, alimentaire, accès aux soins et des moments de détente).

L’histoire du Secours populaire à travers son aide aux réfugiés.

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