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En Charente, le SPF relève le défi de la fracture numérique

Mis à jour le par Anne-Marie Cousin
Depuis le 11 juin 2020, grâce au SPF, Ylies, Marouan et Hanen disposent d'un ordinateur.

Il y a tout juste un an, une quarantaine de familles de Charente se voyaient prêter un ordinateur pour l’année. L’objectif : leur permettre de faire face au télétravail, à l’école à distance et à la dématérialisation administrative. Aujourd’hui, à l’heure du bilan, de nouvelles perspectives s’ouvrent au SPF avec notamment la création d’un espace numérique.

Ylies est le plus jeune de la famille P. Le plus jeune certes, mais pas le plus timide de la fratrie de trois garçons. « L’ordinateur est très rapide, il m’a aidé à faire mes devoirs quand mon école était fermée. Maintenant, je l’utilise pour faire des jeux éducatifs que la maîtresse nous conseille de faire pour nous entraîner en mathématiques, en français et aussi en anglais », explique-t-il avec beaucoup d’enthousiasme. Installé avec Hanen sa maman, il nous fait une démonstration des applications qu’il utilise régulièrement. Élève de CE2, il nous montre le site Ma classe à la maison sur lequel il se connecte au moins une heure par jour. Ludique et facile d’accès, ce site permet aux enfants de s’entraîner et d’approfondir certaines notions. Marouan, l’ainé des trois garçons, est celui qui l’utilise le plus en ce moment, car son collège va fermer plus tôt que prévu, en raison des épreuves du brevet. Lui qui est en 4 eme cette année va finir les quinze derniers jours de classe à distance. Chose qu’il n’aurait pas pu faire sans l’ordinateur du Secours populaire. Exposés, recherches thématiques, exercices d’anglais, tâches administratives, entraînements mathématiques… dans cette famille chacun gère son temps d’utilisation et ses besoins. Et quand les enfants ne s’en servent pas, Hanen, la maman, le range dans le meuble télé du salon.

Avoir un ordinateur a été un vrai soulagement pour nous. Tout était plus simple. Pouvoir le garder aujourd’hui nous fait vraiment plaisir.

Hanen, maman de trois enfants à qui le SPF a offert un ordinateur

Comme Hanen, 40 personnes de Ruffec, Angoulême et Soyaux ont reçu il y a tout juste un an un ordinateur portable pour une durée de 12 mois. A l’issue de cette période, un point avec le SPF devait avoir lieu. Pour le Secours populaire, l’idée était de réduire au maximum la fracture numérique mise en lumière lors du premier confinement. Nombreuses étaient alors les familles qui ne disposaient ni d’une connexion internet ni d’un ordinateur, ou ne possédaient qu’un vieil appareil. Hanen se souvient de l’arrivée de l’ordinateur dans le foyer. « Cela a été un vrai soulagement pour nous. Tout était plus simple. Devoirs, télétravail et besoins de la vie quotidienne. De pouvoir le garder aujourd’hui nous fait vraiment plaisir ».

Un suivi régulier des familles

Aujourd’hui, l’heure est au bilan pour l’association et pour les familles du département de la Charente. Victor, bénévole du comité de Soyaux, est chargé depuis plus d’an an d’accompagner les parents et les enfants pour une utilisation optimale de leur ordinateur. D’origine camerounaise, il est en attente de régularisation et, grâce à sa formation en informatique, il a pu prendre en main ce projet. Actuellement compagnon d’Emmaüs, et bien que moins disponible, il poursuit son engagement au SPF et assure les entretiens auprès des utilisateurs. Durant plus d’un an, il a aussi régulièrement contacté les familles, rédigé et mis à disposition un guide pratique. Et quand cela était nécessaire il se déplaçait aussi à domicile. Il fournissait également des clés 3 G quand il le fallait, notamment dans certaines zones rurales très peu connectées.« J’ai même créé un chat pour répondre en direct quand la situation le nécessitait. Au début, nous avions beaucoup de questions liées à la méconnaissance en informatique des parents. Pour les plus jeunes, on sentait que la maîtrise des outils étaient déjà acquise », précise- t-il. Marouan, l’ainé de la famille P., pour qui l’informatique ne semble plus avoir aucun secret, se rappelle avoir fait le formateur auprès de sa mère quand le nouvel ordinateur est arrivé. « Je faisais le professeur. Je lui ai montré des choses qu’elle ne savait pas faire. Et quand l’ordinateur se bloquait je dépannais aussi. » Et même si cette année les écoles et établissements scolaires sont restés ouverts, les enfants n’ont pas eu cours en présentiel tous les jours. Effectifs réduits dans certaines classes, présence un jour sur deux ou bien une semaine sur deux ailleurs ; il fallait donc pour que le suivi pédagogique se fasse normalement que les enfants soient équipés de matériel informatique et puissent se connecter à Internet.

La formation, un volet indispensable

Madeleine Rouhier, secrétaire générale de la Charente, revient sur ce dispositif mis en place pour lutter contre la fracture numérique le 11 juin 2020. « Notre objectif est de réduire la fracture numérique et de permettre aux familles de faire face à l’école à distance mais aussi à la dématérialisation des documents qui sera généralisée d’ici à 2022. Ce premier prêt, qui vient de se transformer en don, n’est que le début d’une action sur le long terme et qui va se poursuivre par l’achat de 50 autres ordinateurs. Nous allons aussi ouvrir prochainement un espace numérique. » A la question de la mise à disposition d’outils performants s’est ajoutée la thématique de l’accompagnement et de la formation des adultes, d’où le projet de cette prochaine rentrée scolaire avec la création d’un espace numérique dans un espace dédié de la fédération. En effet, dans le bilan réalisé par Victor, il est apparu clairement que, pour les adultes, disposer d’un ordinateur ne réglait pas tous les problèmes. Leurs difficultés mettent en lumière ce qui est communément appelé l’illectronisme. Sa définition est la suivante : « difficulté ou incapacité de certaines personnes à utiliser les outils informatiques en raison d’un manque de connaissances ». Cette situation touche aujourd’hui 17 % des français selon une enquête menée par l’Insee en 2019. Cette étude révèle que 38 % des usagers manquent d’au moins une compétence numérique de base et que 2 % d’entre eux sont dépourvus de toute compétence. Les raisons à l’absence d’équipement à domicile sont variables, mais les plus citées sont les suivantes : un manque de compétence 41 %, le coût du matériel 32 % et l’abonnement 27 %.

En Charente, le SPF relève le défi de la fracture numérique

Pour Madeleine Rouhier, la secrétaire générale, « le numérique est devenu incontournable ». Au quotidien, les bénévoles en font usage.

Ouverture d’un espace numérique

Cette situation ne touche pas que les personnes aidées mais également certains bénévoles, comme nous l’explique Jean-Marc Maguerez, trésorier de la fédération. « Nos outils de gestion et de finances nécessitent une maîtrise de l’informatique qu’ils n’ont pas tous. Soit car leur métier les tenait à l’écart de cette technologie, soit car ils ont décroché du monde de l’entreprise depuis longtemps. Quoi qu’il en soit, notre espace numérique leur sera ouvert et des formations leurs seront dispensées tout comme aux personnes aidées. »Actuellement, ce lieu situé dans les locaux de la fédération est en cours d’aménagement. Avec cinq postes et une imprimante il devrait ouvrir le 5 septembre prochain. Fin juin, la fibre devrait être installée pour offrir une connexion maximale. Pour le volet formation du public, le recrutement d’un conseiller numérique est en cours. A ce jour, cinq personnes ont été rencontrées et deux retenues, la phase finale de recrutement devrait s’achever d’ici la fin de l’été. Pour cette seconde étape, le Secours populaire s’est inscrit dans le dispositif du plan de relance du gouvernement qui comporte un volet inclusion numérique et va permettre le recrutement de 4 000 conseillers numériques sur l’ensemble du territoire.

L’heure du numérique est incontournable

Cette mesure a pour objectif de soutenir financièrement des projets structurants portés par des associations de lutte contre la pauvreté et qui visent à mieux répondre aux besoins des personnes précaires. « Nous avons pris contact avec la préfecture de Charente pour obtenir les 40 000 euros auxquels nous avons droit pour embaucher notre conseiller numérique. Nous allons aussi nous rapprocher de la société Hennessy, qui nous a déjà financé l’achat des premiers ordinateurs. Ce projet implique aussi de nombreux investissements pour être pérenne et c’est pourquoi nous devons réfléchir à d’autres financements, aussi bien privés que publics », précise Jean-Marc Maguerez. En Charente, ce premier volet, lancé il y a un an maintenant, a montré à quel point le numérique était incontournable et que sans ce coup de pouce de l’association, enfants et parents n’auraient pas pu faire face. Il témoigne également de l’enjeu que représente l’accompagnement des personnes aidées pas le SPF. Car fournir un ordinateur ne peut suffire. Par ailleurs, il est aussi question que 50 autres ordinateurs soient mis à la disposition de nouvelles familles dès la rentrée, une fois l’étude des besoins réalisés. « Ce que nous venons de commencer n’est qu’une première étape. Les familles comptent sur nous et nous serons à leur côté. Aujourd’hui, l’heure du numérique est incontournable », affirme Madeleine Rouhier.

En Charente, le SPF relève le défi de la fracture numérique

Gérer les stocks aujourd’hui est informatisé. Pour accompagner personnes aidées et bénévoles, un espace numérique va bientôt ouvrir dans les locaux de la fédération.

 

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