Les enjeux de la planète, le quotidien des bénévoles

Mis à jour le par Olivier Vilain
A Strasbourg, avec les jardins solidaires, les personnes aidées par le Secours populaire préservent leur santé et la planète

La Semaine européenne du développement durable se déroule du 20/09 au 26/09, l'occasion de passer en revue les nombreuses actions que mène le Secours populaire, liant solidarité et développement durable. Pour approfondir sa démarche dans ce domaine, l'association en a fait le thème de son prochain congrès, qui se déroulera en novembre.

L’été 2021 a été marqué par une succession de catastrophes naturelles sans précédent. Incendies géants, ouragans dévastateurs, inondations meurtrières… Du pourtour méditerranéen, des alentours de la Meuse en furie et du Rhin aux steppes Russes, en passant par l’Extrême-Orient ou l’Amérique du Nord, les chercheurs y voient des manifestations du réchauffement climatique qui va faire de plus en plus de dégâts. Déjà, le nombre de fléaux météorologiques, climatiques ou hydrologiques a été multiplié par cinq durant les 50 dernières années, comme l’indique l’Organisation météorologique mondiale, une instance des Nations unies.

Le Secours populaire y voit la confirmation de la nécessité de son engagement en faveur du développement durable et solidaire, qu’il a engagé depuis longtemps. Pour lui donner une nouvelle dynamique, il a même prévu de lui consacrer son prochain congrès, qui se tiendra en novembre. L’association refuse le fatalisme, faisant écho en cela aux préconisations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Ce dernier, dans son rapport rendu début août, rappelle que pour préserver le climat « chaque action compte, chaque année compte », à côté du changement profond de politiques qu’il appelle de ses vœux. Chacun doit donc prendre sa part dans ce nouveau combat.

La solidarité va de paire avec la protection du climat

« Le changement climatique a un impact de plus en plus fort sur les conditions de vie des personnes confrontées à la pauvreté, voire pour les habitant des pays pauvres. Ces derniers sont les premières victimes de ces dérèglements et ont, en plus, le plus de mal à s’en relever », constate Camille Vega, secrétaire national qui porte la thématique du développement durable au sein du Secours populaire. « Nous avons donc pris conscience que pour ‘‘mondialiser la solidarité’’, il faut se préoccuper du changement climatique. » Les bénévoles ont donc développé trois types d’actions liant la solidarité au respect de l’environnement, à la nourriture bio, à la sensibilisation des enfants ; aux côtés des programmes à l’étranger comme le maraîchage ou l’équipement en panneaux photovoltaïques.  

« Le développement durable allie l’économie —la lutte contre la précarité— ; le social avec la participation de toutes les personnes de bonnes volontés ; la culture avec la diffusion des valeurs de la solidarité ; et l’environnement qu’il faut préserver par le biais de notre ancrage local, de notre rôle dans l’économie circulaire », expose Camille Vega, car le Secours populaire n’est pas une association de défense de la nature.

Les « copains du Monde » de Gardanne ont ramassé les sacs plastiques, les bouteilles, les sachets qui polluent lentement aux alentours du lycée Fourcade, dans le cadre du World cleanup day

Le 18 septembre, les « copains du Monde » de Gardanne ont ramassé les sacs plastiques, les bouteilles, les sachets qui polluent lentement aux alentours du lycée Fourcade, dans le cadre de la Journée mondiale du nettoyage


Si le Secours populaire s’est toujours appuyé sur les collectes, en particulier de vêtements, et la mise à disposition auprès des gens qui en ont besoin, Marseille est emblématique de la nouvelle réflexion intégrant les enjeux environnementaux, à la suite de la création d’une « Commission solidarité durable » à la demande des jeunes bénévoles, il y a trois ans. « Nous expliquons désormais l’intérêt de donner une seconde vie aux vêtements et sensibilisons les personnes aidées aux catastrophes que peuvent, au contraire, entrainer la mode jetable », explique Virginie, responsable de la mobilisation de la jeunesse.

La mode jetable constitue en effet un gaspillage phénoménal de ressources naturelles (l’eau en particulier) et entraîne une forte consommation d’énergie fossile, augmentant ainsi la concentration de CO2 dans l’atmosphère. C’est ainsi que les bénévoles ont mis en évidence dans les permanences des affiches réalisées à dessein par les étudiants de l’école de graphisme de Condé, à deux pas du vieux port. « Une exposition sur ce thème va être mise sur pieds dans toutes les permanences des Bouches-du-Rhône », précise Virginie.

Penser l’alimentation, sa production et sa répartition

Plus original, les bénévoles ont mis en place un projet pilote de récupération des huiles usagées. L’idée est simple : les familles recevant de l’aide alimentaire des mains des bénévoles rapportent leur huile usagée (friture, etc.) à Synchronicity, une petite entreprise qui la recycle. « Pour le moment, une seule antenne du Secours populaire est impliquée, mais en décembre il y en aura six, compte tenu des débuts encourageants. »

La sensibilisation et l’accès à l’alimentation bio et locale est un autre axe d’intervention. Les bénévoles de Marseille ont mis en place des paniers paysans pour une cinquantaine de familles en difficulté. Dans les Hautes-Pyrénées, c’est un partenariat avec la chaînes Biocoop qui a débuté. « Ces magasins permettent aux clients de financer des paniers bio pour les familles aidées par le Secours populaire », explique Michèle Gouaz, la secrétaire générale de la fédération locale du Secours populaire. L’action se prolonge sur la sensibilisation au manger local pour préserver sa santé et la planète, avec la visite de fermes bio aux alentours de Tarbes.

A la ressourcerie du Secours populaire de Lomme, dans le Nord, les bénévoles réparent les appareils électroménagers des personnes aux ressources modestes.

A la ressourcerie du Secours populaire de Lomme, dans le Nord, les bénévoles réparent les appareils électroménagers des personnes aux ressources modestes.


« Une action exemplaire car cela crée du lien », insiste Camille Vega, qui appuie par ses connaissances ce type d’initiatives, comme dans le Puy-de-Dôme où les bénévoles organisent pendant plusieurs jours des marchés paysans dans tout le département, « y compris dans les quartiers populaires de Clermont-Ferrand parce que c’est encore plus important pour leurs habitants », détaille Nicole Rouvet, secrétaire générale de la fédération.

Mettre l’accent sur les échanges, le lien

Le Secours populaire développe aussi ses approvisionnements en aliments bio produits par les paysans locaux. « Promouvoir les producteurs locaux, c’est faire fonctionner le tissu local mais aussi réduire le temps de transport et donc limiter les émissions de CO2. On gagne sur tous les tableaux », relève Morgane, chargée de solidarité au sein de la fédération du Haut-Rhin.

L’autre activité qui se développe est la sensibilisation des enfants, notamment à travers le mouvement de jeunesse « Copain du Monde ». Ainsi, les enfants de Montpellier ont passé une journée à nettoyer une plage avec l’association Sea Cleaners, dont c’est la spécialité. Cette dernière les a sensibilisés aux dangers que fait peser la pollution sur la mer et ses organismes vivants. Les petits de Gardanne ont participé à la Journée mondiale du nettoyage le 18 septembre. En Isère, l’effort de sensibilisation des enfants est une priorité. « On le fait chaque année lors de la Chasse aux œufs, à Pâques », résume Corinne Fromentin, coordinatrice de la solidarité dans le département.

Une éducation populaire au développement durable

Et ce n’est pas l’épidémie de Covid-19 qui l’en a empêché. Cette année, à la place des traditionnelles Chasses aux œufs, qui avaient été interdites pour des raisons sanitaires, les bénévoles ont organisé une journée au Parc de la Poya, près de Grenoble. Les enfants ont été sensibilisés au tri à travers des ateliers. « Cela ne règle pas tout mais chacun doit apporter sa contribution », indique Corinne. Et cette sensibilisation augmente aussi la pression pour que les grands choix soient faits en faveur du développement durable au niveau national. « Les enjeux actuels liés aux changements climatiques et leurs impacts sur les conditions de vie des personnes nous conduisent à approfondir cette démarche. Au cœur de celle-ci, l’enfance prend toute sa place ; car comment ne pas construire le monde de demain sans les citoyens de demain ­? », détaille Camille Vega.

Pour continuer dans cette voie, le Secours populaire va consacrer, en novembre prochain, son 38e Congrès sur le thème « Construisons ensemble une solidarité populaire, durable et planétaire­. » Il devra renforcer la démarche de l’association en matière de développement durable, en France et à l’international.


Lors du Village "copains du Monde" d'Indre-et-Loire,les enfants ont été initié à la solidarité internationale et au développement durable, afin d’alimenter leurs réflexions sur le monde et de leur donner envie d’agir

Lors du Village « copains du Monde » d’Indre-et-Loire, les enfants ont été initié à la solidarité internationale et au développement durable, afin d’alimenter leurs réflexions sur le monde et de leur donner envie d’agir dans le cadre du programme « Levier d’Émancipation des Personnes en situation de Pauvreté ou de Précarité »


Les piliers du développement durable
Pour le Secours populaire, le développement durable doit faire se correspondre les différentes dimensions du développement : économique, sociale, culturelle et environnementale. C’est la seule manière de permettre la construction d’un monde « équitable, vivable et viable ». Cette position est en concordance avec « les Objectifs de développement durable » adoptés par l’Organisation des Nations Unies. Cette dernière a fixé à l’horizon de 2030 des objectifs en vue « d’éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous » dans les domaines de l’alimentation, l’éducation, la santé, l’égalité entre les femmes et les hommes, l’accès à l’eau, à l’énergie, la préservation de la vie terrestre et aquatique…