A Saint-Martin, le soutien continue 4 ans après Irma

Mis à jour le par Olivier Vilain
Une soixantaine de jeunes vivant dans le quartier pauvre de Sandy Ground fréquentent l'atelier de réparation de vélos de l'association Madtwoz Family. Ils en font un lieu de débrouille, de détente et d'échanges.

Quel bilan, quatre ans après le passage de l’ouragan Irma sur l’île de Saint-Martin ? Le Secours populaire s’est très rapidement engagé auprès d’une association locale, appelée Madtwoz Family Association, implantée auprès des jeunes du quartier très pauvre de Sandy Ground, dont les deux tiers sont sans travail.

Rappel des faits : le 6 septembre 2017, l’ouragan Irma ravageait de nombreuses îles des Caraïbes. Il était suivi par des tempêtes tropicales plus petites, José, Katia, Maria…  Immédiatement, le Secours populaire est venu en aide à des dizaines de milliers de sinistrés et de sans-abri. Au total, plus de 30 000 ont pu être aidés avec 62 tonnes de produits alimentaires et 200 000 pastilles de potabilisation.

A mi-chemin entre la Guadeloupe et Porto-Rico, l’île de Saint-Martin a été dévastée par le passage d’Irma. Devant ces dégâts, l’idée a été de reconstruire les liens pour la jeunesse pauvre, qui vit sur une langue de terre étroite, bordée par l’océan sur deux côtés, appelée « Sandy Ground ». Ce quartier, considéré comme prioritaire depuis 2014, du fait du nombre élevé de chômeurs, de jeunes inactifs non scolarisés et de logements insalubres, compte environ 5 000 habitants.

Les Pères Noël verts sont venus à Saint-Martin en 2017 auprès des enfants sinistrés. L'une des nombreuses actions menées sur place par le Secours populaire en lien avec ses partenaires.

Les Pères Noël verts sont venus à Saint-Martin en 2017 auprès des enfants sinistrés. L’une des nombreuses actions menées sur place par le Secours populaire en lien avec ses partenaires.


Il a été particulièrement affecté par le passage de l’Irma : toutes les infrastructures culturelles et sportives ont été détruites et les deux écoles primaires, gravement endommagées. Après ces destructions, « les enfants, allant en cours à des horaires alternés, passaient la moitié de leur journée dans la rue, cherchant de quoi s’occuper », rapportait la mission du Secours populaire s’étant rendue sur place, à 6 000 kilomètres de la métropole.

Un partenariat qui dure depuis 4 ans

Depuis cette période, le Secours populaire soutient l’association Madtwoz Family Association, fondée par Jérémy Watt, qui a aujourd’hui 31 ans. « Si l’association est toujours vivante, c’est grâce au Secours populaire, souligne ce dernier. Après le passage d’Irma, son soutien nous a donné de l’espoir. Avant l’ouragan, c’était déjà la galère ici ; personne ne faisait confiance aux jeunes, à cause des préjugés à leur encontre. »

Depuis 2012, l’association intervient auprès des jeunes. Elle leur propose l’accès à un cyber-café, un atelier de réparation de vélos, l’édition du magazine Friendly Mag, des animations sportives, un atelier d’impression textile, un studio d’enregistrement et aussi du soutien scolaire. « L’objectif, c’est d’être là pour les jeunes d’ici, (…) leur montrer que les gangs ne sont pas la solution », dit Jérémy, devenu pour tous dans le quartier « Mr President », le symbole d’un renouveau possible.

Une superbe équipe organisée par Madtwoz Family - avec des jeunes de Saint-Martin et du conseil municipal de Mulhouse, venus avec le Secours populaire - a nettoyé la plage de Sandy Ground en Février 2020.

Une superbe équipe organisée par Madtwoz Family – avec des jeunes de Saint-Martin et du conseil municipal de Mulhouse, venus avec le Secours populaire – a nettoyé la plage de Sandy Ground en Février 2020.


Malgré la circulation du coronavirus, les jeunes continuent de répondre présents : une soixantaine apprennent à réparer leur vélo ; 80 participent aux ateliers de street art ; le magazine qu’ils créent diffuse à 1 000 exemplaires ; le studio d’enregistrement enregistre un grand succès avec la fréquentation de 150 jeunes.

Un quartier toujours dévasté

Sandy Ground ne connait pas encore un retour à la normale, même au bout de quatre années. « Il y a toujours des toits détruits, des maisons abandonnées car les propriétaires n’ont pas les moyens de les remettre en état, d’autres familles vivent encore dans une seule pièce car, après Irma et l’épidémie de Covid-19, ils n’ont plus les moyens », décrit Jérémy.

Dans l’île, de l’argent a été apporté par les pouvoirs publics après les ouragans, mais il a été essentiellement consacré au nettoyage des débris et à la démolition des bâtiments frappés d’un arrêté de péril. En revanche, les sous manquent pour reconstruire. « Les deux sources visibles d’apports d’argent viennent des assurances, pour les particuliers qui ont souscrit des polices correctes, ou des investissements venant de l’extérieur », croit savoir le fondateur de Madtwoz Family.

Le contraste est saisissant avec la partie néerlandaise qui « s’est relancée beaucoup plus vite » et où « la reconstruction a déjà été mise en œuvre ». Du côté de Sandy Ground, les terrains de foot, de golf, le cinéma ou la Maison de la jeunesse et de la culture sont encore abandonnés « alors que nous sommes un quartier prioritaire ».

 

L’apparition du SARS-CoV2 a perturbé la vie de l’association, comme celles des habitants de Sandy Ground. Le quartier, déjà pauvre et meurtri par Irma, a encore été mis sous pression par le virus, les confinements et les couvre-feux. La vie quotidienne est devenue si dure que des mouvements de protestation ont éclaté. Dans ce contexte, Madtwoz Family a été la seule organisation à y effectuer des distributions alimentaires, avec l’appui du Secours populaire.

Seule association présente pendant l’épidémie

« En plus des habitants en détresse, nous avons aussi fourni des repas à de nombreux réfugiés venant du Venezuela, un phénomène dont personne ne parle. » Près de 1 200 personnes en ont bénéficié entre 15 avril et le 15 mai 2020. Les colis étaient composés de pâtes, de riz, de lait, etc., et de produits d’hygiène pour aider les familles à surmonter la crise. Celles avec des enfants de moins de 4 ans ont bénéficié d’un colis particulier, dans lequel était ajouté des lingettes, du lait infantile et des couches-culottes.

Après l’aide d’urgence pour maintenir à flot l’association, puis les aides pour répondre au Covid-19, le soutien du Secours populaire est entré dans une nouvelle phase : la structuration et la pérennisation de Madtwoz Family. Celle-ci apprend à devenir autonome en développant ses ressources financières et en maitrisant les demandes de subventions publiques et privées. « L’atelier d’impression textile a enregistré 100 commandes, provenant de particuliers et d’une vingtaine d’entreprises, nous faisant bénéficier d’un apport de trésorerie », rapporte Jérémy Watt. Le programme de soutien devait s’arrêter à la fin de l’année, mais en raison des perturbations liées à l’épidémie, il sera prolongé de 4 mois.

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