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Quand l’hygiène devient un luxe…

Mis à jour le par Anne-Marie Cousin
Dans les libres-services du SPF, les personnes aidées peuvent trouver des produits d'hygiène.

  Aujourd’hui en France, trois millions de Français n’ont pas les moyens de conserver une hygiène correcte : par manque de moyens et parce que les produits sont chers. Au quotidien le SPF tente de répondre à leurs difficultés.      

Les chiffres rendus publics par l’enquête IFOP à la demande de l’association « Dons solidaires » sur l’hygiène des plus précaires révèlent que trois millions d’entre eux n’ont pas les moyens de conserver une hygiène correcte.Cette réalité le Secours populaire la connaît bien et tente depuis de nombreuses années d’y faire face, soit en organisant régulièrement des collectes de produits d’hygiène ou en établissant des partenariats. Dans le département du Cher, le Secours populaire a ouvert en ligne. Ainsi, depuis le 5 mars et jusqu’au 30 juin 2019, ceux qui le souhaitent sont invités à financer l’achat de produits d’hygiène faisant cruellement défaut. Le SPF du Cher estime qu’avec la somme de 5 000 euros elle pourrait répondre aux besoins essentiels des personnes aidées pendant un an. L’an dernier la fédération s’était déjà mobilisée sur cette question et avait collecté en deux jours l’équivalent de 3 747 produits d’hygiène. Pour Arlette, bénévole à Bourges qui gère les collectes, le besoin de produits d’hygiène est criant : « Les personnes que nous recevons ont certes besoin de se nourrir mais il faut aussi qu’elles puissent se laver, laver leur linge et disposer de tous les produits nécessaires à une hygiène correcte. Les collectes fonctionnent bien, mais avec une cagnotte nous pourrons acheter ce dont nous avons besoin au fur et à mesure.» Lancée il y a plus de deux mois, la cagnotte a déjà comptabilisé presque 300 euros de dons.

Collectes de produits hygiéniques

En Haute-Savoie le comité du Chablais est lui aussi mobilisé. En partenariat avec le ClubEvianSport, Intermarché et Century 21 il a organisé du 4 au 31 mars 2019 une collecte « hygiène » qui a rapporté 62 kilos de produits. Durant la même période, des écoles maternelles et primaires de la ville d’Evian ont été sollicitées pour y participer, ce qui a permis d’ajouter 58 kg de produits.Comme le précise Arlette de Bourges « Cette mobilisation n’est pas qu’un phénomène de mode. Certes les médias se font le relais de cette question aujourd’hui, mais dans nos permanence d’accueil c’est une réalité quotidienne qui existe depuis longtemps ».

« J’achète les protections les moins chères »

Preuve en est avec les nombreux témoignages recueillis par les bénévoles de l’association. Pour Gavaz, 34 ans, mère de deux enfants et habitant Lille, le constat est sans appel : « Je dépense 2,80 euros par mois pour acheter des protections périodiques. C’est compliqué de garder un budget pour soi et son hygiène intime avec 494 euros pour vivre par mois à 4. J’achète les protections les moins chères. » Comme elle, de nombreuses femmes sont en difficulté lors de leurs règles. Plus de 1,5 million de femmes ne changent pas suffisamment de protections hygiéniques ou ont recours à des moyens de fortune. Cette précarité menstruelle peut avoir des conséquences sanitaires graves puisqu’une protection gardée trop longtemps peut provoquer un syndrome de choc toxique.

Partenariat avec Vania

Aux collectes régulières mises en place dans les comités et fédérations s’ajoutent des partenariats qui permettent de disposer des produits nécessaires. Grâce à l’opération #Leconfortpourtoutes, Vania s’engage pour les femmes au côté du Secours populaire. Ainsi du 1er mai au 30 juin 2019 pour l’achat d’un paquet de serviettes hygiéniques Vania, une serviette est offerte au Secours populaire. Ce partenariat devrait représenter un don de 142  000 paquets, qui seront ensuite redistribués dans les permanences d’accueil.Vivre avec les minimas sociaux ou ne disposer d’aucun revenu conduit à faire des choix parfois terribles pour certaines personnes, notamment en matière d’hygiène. Les enquêtes menées par de nombreuses associations mettent en lumière des situations extrêmes. 30 % des personnes aidées par les associations déclarent ne pas changer les couches de leurs enfants aussi souvent qu’il le faudrait.

Un quotidien difficile

Quant à l’entretien du linge, 5 millions de Français sont obligés de faire leur lessive à la main. Et pour la moitié d’entre eux, faute de pouvoir acheter de la lessive, ils utilisent du gel douche ou du liquide vaisselle. Une réalité dont témoigne Sébastien Tholot, secrétaire national du Secours populaire : « Le reste à vivre moyen des personnes accueillies au Secours populaire français est de 5,7 € par jour. Cela laisse donc très peu, voire pas de possibilité de répondre à tous les besoins vitaux. De nombreuses femmes doivent tous les jours faire des choix contraints, encore plus lorsqu’elles sont seules avec leurs enfants et qu’elles privilégient les dépenses pour eux. Nous constatons que la question de l’hygiène passe après d’autres besoins.»

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