Copain du Monde

Le Limobulles fait sa tournée d’été

Mis à jour le par Olivier Vilain
Vacances. Collecte. Enfants Copain Monde. Limonade.
L'équipe "Copain du Monde" propose des limonades fraîches et gratuites aux passant, avec le chariot Limobulles ©N. Bardou / SPF

Dans les rues du Mans, les « Copain du Monde » proposent aux passants des limonades bien fraîches, l’occasion d’informer sur la grande proportion d’enfants ne partant jamais en vacances. L’occasion aussi de collecter des fonds pour offrir des séjours en colonies de vacances à des petits vivant dans des familles monoparentales, très précaires.

« Voulez-vous une limonade au citron bio? Cest frais, cest gratuit ! » Tout sourire, Anaïs tend un gobelet à une personne assise sur un banc, place Saint-Nicolas, en plein centre-ville du Mans. Un rafraîchissement est bien venu alors que les rayons du soleil mordent un peu la peau. Comme les passants acceptent souvent la limonade, Anaïs engage la conversation : « “Copain du Monde”, vous connaissez? Cest une association qui aide les personnes en difficulté qui nont pas assez dargent, pour partir en vacances par exemple », explique-t-elle.

« Nous aspirons toutes à un monde plus juste et solidaire »

La petite n’est pas venue seule. Ses amies Anaé, Anaïs, Aliya, Ibtisen, Naëlla, Nahlia et Lucienne l’accompagnent. Elles arborent toutes les badges et les t-shirts « Copain du Monde » pour être facilement identifiées par les passants. Toutes ont entre 8 et 14 ans. Dans cette ambiance de gaieté, leurs sourires laissent voir plusieurs appareils dentaires. Elles se sont toutes apprêtées, avec bracelets, boucles d’oreilles et souvent des tresses. « Nous aspirons toutes à un monde plus juste et solidaire », résume Aliya, 10 ans. Le groupe s’est réparti entre la place Saint-Nicolas et, dans son prolongement, celle de l’hôtel de ville.

Vacances. Enfants Copain Monde. Le Mans.
Sur la place de l’hôtel de ville du Mans, les « Copain du Monde » collectent pour les vacances ©N. Bardou / SPF

Sur la première place, les enfants ont disposé une charrette, appelée la Limobulle, destinée à attirer l’attention. En face de la mairie, l’autre demi-groupe a installé une grande table sur laquelle sont posés plusieurs pichets de citronnade. « Nous collectons, cette fois, pour la campagne vacances mais nous avions déjà offert du chocolat chaud, cet hiver, pour une autre campagne. Les petits bénévoles comme les badauds avaient bien aimé cette initiative », explique Alicia, chargée de développement au Secours populaire dans la Sarthe.

L’opération est l’occasion de faire prendre conscience aux Manceaux des inégalités en matière de vacances. Assis sur un banc, Jules, 18 ans, est plus concentré sur le bac qu’il va passer que sur les beaux jours à venir. Il n’en lit pas moins attentivement le tract qu’une des petites lui a donné : « Je suis surpris: un enfant sur trois ne part pas en vacances, ça me semble énorme à l’échelle de la France, un pays qui est relativement riche. » En face de lui, son amie Louise, plus jeune d’une année, apprécie « que les enfants sensibilisent les gens sur les inégalités en matière de vacances ».

Les dons font grossir la cagnotte pour les départ en vacances

Au centre de la petite place aux pavés de grès multicolores, Sophie et Katherine, bénévoles, restent à côté de la Limobulles. « Cette initiative permet de financer des vacances, car partir au moins une fois par an est fondamental. Comme la culture, ça permet de s’évader, de connaître dautres gens, d’échanger », souligne Katherine, enseignante d’histoire-géographie fraîchement à la retraite. Au Secours populaire, elle reçoit désormais les familles confrontées à la précarité pour leur proposer des séjours (colonies, centres aérés, départs en famille, séjours en famille de vacances).

Les dons de l’opération Limobulles vont grossir la cagnotte pour faire partir les enfants, notamment ceux vivant dans une famille monoparentale, qui est la catégorie la plus précaire de la société française. Chaque année, les bénévoles de la Sarthe font partir une dizaine de familles dans deux campings en Loire-Atlantique. « Contrairement aux colonies, les départs en familles sont autofinancés par les Chèques-vacances et les aides de la Caisse dallocations familiales, complétées à la marge par la modeste participation des personnes aidées », relate Alicia, la chargée de développement.

Enfants Copain Monde. Vacances. Collecte.
L’équipe « Copain du Monde » du Mans est très active et pleine de bonne humeur ©N. Bardou / SPF

Tous les bénévoles sont attachés à la campagne vacances et se démènent pour collecter. Professeur de français et de latin, Sophie a surtout constaté les effets des vacances en 2020, après les confinements décidés à cause de l’épidémie de Covid-19. « Les enfants qui ne sont pas ensuite partis l’été étaient plus tendus. C’était terrible pour eux. Leur mal-être se voyait dès la rentrée des classes. » Pour elle, ce moment de césure est similaire aux « sorties scolaires, car il ouvre à d’autres horizons ».

Certaines participantes à l’opération connaissent des filles ou des garçons qui ne partent jamais en vacances. Anaïs, 11 ans, se souvient de l’un d’eux « qui se sentait un peu seul quand tous les enfants de l’école partaient en été ». Elle se sent triste quand elle y pense. « Ça ne devrait pas être un luxe. Jaimerais quils puissent partir sans se demander si ça va coûter cher à leurs parents. »

Des enfants très débrouillards et très conscients

Le club « Copain du Monde » d’Anaïs et d’Aliya est constitué d’enfants très débrouillards. Anouck, Lucienne et Jeanne sont venues voir le Secours populaire en 2022 avec un chèque pour les réfugiés venus d’Ukraine. « Avec mes amies, on a fait des crêpes et des gâteaux et on les a vendus à une fête organisée par mon papa », raconte Lucienne, qui est grande – avec ses cheveux longs et casquette sur la tête – pour ses 10 ans et demi.

Le petit groupe s’est intégré aux actions déjà existantes, des collectes, des opérations papier cadeau ou des distributions alimentaires. Puis, dans un second temps, le club s’étant étoffé, les « Copain du Monde » ont mené leurs propres actions, comme le Limobulles. En fin de journée, l’autre groupe s’est activé, place de l’hôtel de ville. Naëlla, dont le sourire anime ses petites fossettes, récapitule sa journée passée à proposer de la limonade aux passants. « Si tu leur souris, ils acceptent très facilement. »