Copain du Monde

À Nîmes, les Pères Noël verts battent le pavé

Mis à jour le par Olivier Vilain
Les bénévoles, des plus âgés aux plus jeunes, ont fait une chenille remarquée sur la place de l'Horloge ©Maïté Baldi / SPF

La fanfare et les éclats de rire de la parade des Pères Noël verts ont résonné dans les ruelles de l’ancienne cité romaine, le 6 décembre dernier. Les « Copain du Monde » ont participé à cet événement où bénévoles et habitants se sont croisés le temps d’un défilé vivant destiné à collecter de quoi offrir des jouets à tous les enfants.

Place du Marché, un parfum de fête flotte dans l’air frais du début décembre. Les bénévoles du Secours populaire se saluent, s’embrassent et mettent tous un bonnet vert. « C’est ma vraie barbe ! », plaisante Michel, l’un des deux Pères Noël verts de la journée, fier d’entrer aussi bien dans la peau de son personnage.

Depuis trois ans, cette parade ouvre la campagne hivernale du Secours populaire à Nîmes. « Nous commençons chaque campagne par une initiative hors les murs. Ça nous permet d’expliquer aux gens ce que l’on fait. C’est un bon moyen de communiquer », explique Fabienne Lauron, secrétaire générale du Secours populaire dans le Gard. L’objectif est double : donner de la visibilité aux bénévoles et collecter de quoi acheter des jouets neufs pour les familles accueillies par le Secours populaire, « pour que Noël n’oublie personne », comme le résume la campagne de l’association.

Funky Brandade et bonnets verts

Ils sont une quarantaine à déambuler : des retraités, des lycéens, des jeunes couples, des familles aidées. « Copain du Monde », le mouvement de jeunesse de l’association, ouvre la marche. L’ambiance est enjouée, ponctuée de rires et de discussions. Une première photo de groupe immortalise le départ, place du Marché, une autre sera prise plus tard sur les marches blanches de la Maison Carrée, l’ancien temple romain qui symbolise autant la ville que les arènes, très bien conservées.

Au coin du monument, la fanfare Funky Brandade donne la mesure. Quatorze musiciens colorés, en rouge et vert, font vibrer toute une section de cuivres aux côtés de percussions, au pied d’un immense sapin illuminé. Leur nom est un clin d’œil gourmand au plat le plus connu de Nîmes, cuisiné à partir des morues ramenées par les pêcheurs du port de Sète, très proche.

Le soubassophone pulse, les trompettes trillent, les saxophones chaloupent. L’un des musiciens porte un bonnet avec un petit pompon sur ressort. Ce détail improbable fait rire tout le monde et contribue à l’ambiance chaleureuse. L’énergie se propage aux passants qui se massent autour de la fanfare, applaudissent, prennent des photos. Certaines reprises rythmées font danser la foule.

Dans les ruelles pavées de tomettes claires de forme hexagonale, la parade serpente. Sur la sono que tire Luisa Benbouzid, directrice au Secours populaire du Gard, défilent les classiques des fêtes de fin d’année — de Mariah Carey à « Petit Papa Noël ». Les bénévoles frappent dans leurs mains, fredonnent. Des passants commentent : « Oh, c’est mignon ! », s’extasie une dame ; « Le petit papa Noël, c’est la première fois que je le vois en vert ! », s’étonne un homme en montrant Michel et sa « vraie barbe » à sa femme.

Au détour d’une ruelle, Benjamin glisse une pièce dans un tronc de collecte tendu par une bénévole. « Je connais bien le Secours populaire. Quand il y a une animation sympathique comme celle-là, je donne systématiquement. » Plus loin, Fabienne, venue d’Orange pour rendre visite à sa fille, fait la même chose que Benjamin, en précisant : « On ne laisse pas les gens dans la galère. »

« Copain du Monde », la jeunesse solidaire

Le club « Copain du Monde » de Nîmes, créé quelques mois plus tôt, prend son envol. « C’est juste le début, mais ça faisait longtemps qu’on avait envie de créer un club. Les enfants ont un tas d’idées ! », explique Amélie Thiriot, la référente du club. Depuis sa création, le club a déjà vendu des verres siglés au nom du Secours populaire, récoltant 400 euros destinés à l’achat de pompes à eau pour des paysans malgaches. Il a aussi participé à des collectes alimentaires et à la Journée des oubliés des vacances hors-norme, organisée à Paris pour les 80 ans du Secours populaire, baptisée « la JOV de Ouf ! ». « L’un des projets des ‘‘Copain du Monde’’ est d’organiser un après-midi consacré à des jeux de société ouvert à tous », raconte Amélie. « C’est une idée sympa, festive, qui permet de proposer des moments conviviaux et de favoriser les rencontres. »

Pour Naimi, 13 ans, la parade est avant tout un moment de partage : « Ce que j’aime, c’est qu’on a des projets pour aider les autres. Avec la parade, on rencontre des gens et on leur parle de solidarité. » L’adolescent rit : « J’aime voir les musiciens heureux de jouer, ça incite à danser ! » À ses côtés, Gabriel, 12 ans, et sa sœur Emma, 9 ans, se souviennent avec enthousiasme du séjour d’été organisé par le Secours populaire dans les Cévennes, l’année dernière. Ils sont présents aujourd’hui pour collecter de quoi acheter des jouets neufs pour les familles accueillies par le Secours populaire : « Tous les enfants ont droit à des cadeaux à Noël », insistent-ils.

Parmi les bonnets verts, on croise Hélène, Fatima, Michel, Luisa… ou Françoise, bénévole à la retraite, qui s’occupe de l’accompagnement scolaire de deux enfants par an. « Je les ai emmenés deux fois au musée, dont celui de la Romanité, parce qu’on avait vu leurs cours sur les Gaulois et les Romains. »

Plus jeune, mais tout aussi motivée, Blanche, 17 ans, en terminale au lycée Hemingway, fait partie des nouveaux visages du Secours populaire à Nîmes. « J’ai toujours voulu être bénévole. Dans d’autres associations, mon âge bloquait. Ici, j’ai été accueillie facilement. » Elle a conçu, à l’aide du logiciel Canva, des flyers ronds avec sur une face le slogan « Tout ce qui est humain est nôtre » entouré d’une guirlande de Noël et, sur l’autre, un QR Code renvoyant au compte Instagram du comité du Gard. « Comme ça les gens pourront s’abonner. » Elle donne aussi un coup de main pour les réseaux sociaux de l’association, prépare le Don’actions, la campagne annuelle de collecte du Secours populaire pour garantir son indépendance. Elle prépare encore des expositions pour le 80ᵉ anniversaire de l’association dans son lycée et dans un autre établissement scolaire. Sa copine Pauline, également en terminale, est « venue en renfort ».

À leurs côtés, Adèle et Manelle, toutes deux en terminale, sont venues « pour parler avec des personnes avec qui on n’échange pas tous les jours ». Leurs regards pétillent. « C’est l’occasion de connaître leur vécu », dit Manelle. Leur curiosité n’est pas anodine : l’an dernier, leur classe a remporté le premier prix du photoreportage du quotidien local Midi Libre après un voyage à Bruges et Bruxelles.

Deux éducatrices, Romane et Amandine, de l’Association de développement de la prévention spécialisée, marchent aussi dans le cortège. Elles sont venues avec Myriam, 23 ans, et Rhania, 14 ans, qui habitent au Mas de Mingue et au Chemin Bas d’Avignon, deux quartiers très pauvres de Nîmes : « On est là pour aider les gens, les découvrir, voir autre chose que notre quartier. »

Une fin de parade à l’image de Noël

Dans le Gard, un habitant sur sept vit sous le seuil de pauvreté ; dans certains quartiers, c’est jusqu’à 80 % de la population qui sont plongés dans la dureté de la vie à découvert. Le contraste est fort avec la gaité de la parade. « L’an dernier, nous avons accompagné 2 700 personnes pour les fêtes. Le Père Noël vert a distribué 1 200 jouets et un millier de colis festifs, dont 150 pour des étudiants », précise Fabienne, la responsable locale du Secours populaire. Et d’ajouter : « Sans le Secours populaire à Noël, beaucoup seraient encore plus isolés, sans loisirs, sans sport, avec moins de liens sociaux. »

« On est perdus, non ? », s’amuse une bénévole dans l’entrelacs de ruelles qui finit par déboucher sur la place de l’Horloge. La troupe y forme une chenille improvisée au pied de la tour et de son immense cadran, sous le regard amusé des passants. Les rires éclatent, les passants filment, quelques-uns battent la mesure. Dans les troncs, les pièces tintent. Grâce à cette déambulation joyeuse, le Père Noël vert apportera encore plus de jouets neufs et rejoindra les mains des enfants qui espèrent tous de Noël et de sa nuit étoilée.

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