Accompagner

  • Accès aux soins

« Grâce à PMRS, je vais pouvoir donner naissance à mon enfant »

Mis à jour le par Pierre Lemarchand
Dina Al-Nahhal, devant la tente qu'elle occupe dans le camp de déplacés de Sheikh-Radwan, dans la ville de Gaza. Juillet 2025
Dina Al-Nahhal, devant la tente qu'elle occupe dans le camp de déplacés de Sheikh-Radwan, dans la ville de Gaza. Juillet 2025. ©PMRS/SPF

Dina est une des 7500 patients soignés chaque jour dans la bande de Gaza par le Secours médical palestinien (PMRS), le partenaire historique du Secours populaire en Palestine. Dans un contexte de guerre et de drame humanitaire, Dina se prépare à donner naissance à son deuxième enfant. Elle témoigne.



Je m’appelle Dina Al-Nahhal, j’ai 21 ans. J’ai donné naissance à une petite fille il y a 2 ans, juste avant la guerre et j’attends mon deuxième enfant ; je suis à sept mois de grossesse. Mon mari et moi étions propriétaires de notre maison mais elle a été bombardée et maintenant nous habitons sous une tente dans le camp de Sheikh-Radwan, dans la ville de Gaza. Les conditions de vie dans les tentes sont très dures. Cette nuit, à 1h30, nous avons été bombardés. Je suis épuisée. Il n’y a, dans les tentes du camp, ni cuisine ni salle de bain. Aucune possibilité d’avoir un peu d’intimité. Nous avons cette seule tente et elle contient toutes nos possessions – elle contient toute notre vie. 

Quand je me lève le matin, je lave d’abord ma fille puis je me lave. Je nettoie la tente pour nous prémunir des maladies. Ensuite je prépare le petit déjeuner pour ma fille. Elle me réclame du pain, mais nous en avons rarement. Je lui achète souvent un biscuit à 1 shekel. Quand je n’ai plus un seul shekel, je détourne son attention en lui donnant un verre d’eau ou en jouant avec elle, jusqu’à ce que nous allions à la “tekiya” [la soupe populaire] pour nous procurer notre déjeuner. C’est le plus souvent notre seul repas. Avec, quand on a de la chance, un morceau de pain, si on a pu acheter de la farine. La farine, c’est la clé de notre survie. Quand on en trouve 1 kg, on peut tenir trois jours avec.

J’ai fait la connaissance de Weam, une sage-femme de l’association PMRS, au tout début de ma grossesse. Elle m’a beaucoup aidée, en me prodiguant de nombreux conseils, en me délivrant des médicaments, notamment de la vitamine B9 pour que le bébé aille bien. Je sais que ça a été très compliqué pour PMRS de se procurer ce médicament car il n’est plus disponible sur le marché. Les médicaments sont devenus soit introuvables, soit hors de prix. Weam m’examine et me soigne mais, aussi, elle m’écoute et me soutient. C’est une médecin mais je la considère comme une sœur. A chaque fois que j’ai mal, que je suis inquiète, que j’ai besoin de parler ou d’un conseil, je la trouve à mes côtés. Je sais qu’elle aussi vit dans une situation difficile, qu’elle survit dans un tente comme moi, mais elle est toujours là pour m’aider. 

Elle m’apporte du magnésium, des vitamines et du fer, car nous ne mangeons plus d’aliments qui en contiennent et j’en ai besoin pour ma grossesse. Je souffre d’anémie et cela occasionne de fortes douleurs au dos, car je suis trop faible pour porter mon enfant. Je suis dénutrie et ne pèse que 45 kilos – mon poids n’a pas augmenté depuis 7 mois que je suis enceinte. Mon fœtus ne se développe pas correctement. Aussi, PMRS me finance des injections – je ne pourrais jamais les payer moi-même car chaque injection coûte 100 shekels. Grâce à l’aide de PMRS, je garde au fond de moi de l’espoir et je sais que je vais pouvoir donner naissance à mon enfant. 

C’est un garçon et je l’appellerai Maher. Il me reste un morceau de tissu ; je vais l’amener chez le couturier pour lui confectionner des sous-vêtements. Ma voisine m’a proposé de m’apporter un berceau en bois. Mais je n’ai pas envie de faire dormir mon bébé dans un berceau. Une nuit, il y a peu, ma cousine a été bombardée. Elle a été projetée dans un coin et, quand elle a repris ses esprits, son bébé qui dormait dans son berceau avait disparu. Elle a retrouvé le corps de son enfant quatre jours plus tard ; il avait été projeté dans un arbre. Cela a ancré en moi une peur immense. Je ne me sépare plus jamais de ma fille, et je ne me séparerai pas de mon bébé non plus. Désormais, l’endroit le plus sûr pour nos enfants, c’est sur nos genoux, dans nos bras. Mon enfant dormira contre mon cœur.

Propos recueillis le 6 juillet 2025, ville de Gaza, camp de Cheick-Radwan.


Solidarité pour Gaza : poursuivre notre soutien, ne pas abandonner


Le directeur du Secours Médical Palestinien (PMRS), avec qui le Secours populaire français entretient un lien de solidarité profonde et durable depuis 1979, adresse un message bouleversant depuis Gaza.

Tous les professionnels de santé refusent de quitter la ville de Gaza. Il est pratiquement impossible d’évacuer les hôpitaux. Aucun habitant ne croit que se diriger vers le sud est sûr. Environ un million de personnes sont sommées d’évacuer, ce qui est impossible. Les forces d’occupation s’emploient à effacer Gaza de la carte.



Chacun et chacune assiste à un déchaînement de violence et d’inhumanité où les populations civiles — plus particulièrement les enfants, les femmes, les femmes enceintes et les personnes âgées — paient le plus lourd tribut. Des familles décimées sous les bombardements, des vies brisées, sans eau, sans nourriture, sans hygiène, sans espoir. Les équipes de PMRS agissent au péril de leur vie, pour venir en aide et redonner espoir. Face à cette tragédie humanitaire, le Secours populaire français réitère son appel à une mobilisation urgente et massive et débloque une aide de 100 000€ de son fonds d’urgence. Il faut continuer à traduire en actes concrets le soutien aux équipes de PMRS en relayant leurs témoignages, en collectant des ressources financières pour soutenir celles et ceux qui, pris au piège des bombes, tentent de survivre dans des conditions inhumaines. Ne les abandonnons pas.