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Bangladesh : 2020, une année au coeur de la tempête

Mis à jour le par Pierre Lemarchand
Juthi, de retour du puits, se rend à son jardin. Tous deux avaient été détruits par le cyclone Amphan en mai 2020 et ont été réhabilités par le partenaire du Secours populaire au Bangladesh, GK Savar.

Le passage du cyclone Amphan en mai 2020, conjugué à la pandémie de Covid-19, ont éprouvé les programmes mis en œuvre dans le sud-ouest du Bangladesh par le partenaire du Secours populaire, GK Savar, pour soutenir les populations les plus pauvres, telles les populations rurales ou les réfugiés Rohingyas. Ce fut aussi, comme c’est souvent le cas dans les contextes de crise extrême, l’occasion d’éprouver la solidité des liens tissés entre les deux associations française et bangladaise depuis bientôt vingt ans.

Mi-mai 2020. En France, nous assistons, impuissants, à la progression du cyclone Amphan, qui s’apprête à aborder et dévaster les côtes de l’Asie du Sud-Est et en particulier celles du Bangladesh, qui se remet à peine du passage d’une autre tempête meurtrière, Sidr, en 2007. Les pensées du Secours populaire sont dirigées vers son partenaire local, GK Savar, qui jette alors ses forces dans le combat contre le coronavirus. L’association bangladaise met en œuvre un vaste projet d’urgence visant à sensibiliser les populations aux gestes barrières, former les personnels de santé, permettre au plus grand nombre d’accéder aux tests, mettre en place des hôpitaux de campagne et soutenir les familles les plus pauvres par la distribution de colis alimentaires. C’est sur ce dernier volet que décide de se concentrer le Secours populaire, débloquant la somme de 20 000 euros qui permet à GK de venir en aide à plus de 1500 familles.

Petite histoire de GK Savar

GK Savar, quand il faut imaginer un programme pour lutter contre la pandémie de Covid-19, fait preuve d’une efficacité remarquable : la santé est au cœur de ses pratiques solidaires depuis sa création. Il faut remonter cinquante ans en arrière, en 1971. C’est alors la guerre d’indépendance qui oppose les rebelles bengalis au pouvoir central pakistanais. Un jeune médecin, Zafrullah Chowdhury, établit un hôpital de campagne pour soigner les combattants de la liberté et les réfugiés. A l’issue de la guerre est créé, sur l’impulsion du docteur et d’une vingtaine d’autres volontaires, Gonoshasthaya Kendra (littéralement « Centre de santé pour le peuple ») : l’hôpital est installé à Savar, à 40 km au nord de la capitale, Dhaka. 

Ainsi naît, en 1972, GK-Savar, qui devient une organisation pionnière en matière d’accès à la santé pour les population rurales et pauvres du Bangladesh. « Le développement se fera avec les plus démunis et passe prioritairement par les femmes » : telle est la devise de GK-Savar qui ajoute bientôt à la création de centres de santé l’accès des plus pauvres à l’éducation et à l’emploi et l’émancipation des femmes. 

La rencontre entre GK Savar et le SPF

Les routes du Secours populaire et de GK se rejoignent à l’aube des années 2000, autour d’un projet visant à offrir aux femmes une consolidation des savoirs de base et une formation technique à la conduite. « Mon rêve est d’être indépendante et de gagner ma vie. J’ai bien compris qu’à moins d’être indépendantes, les femmes ne peuvent pas s’en sortir », témoigne Manika, 26 ans, en 2006. Grâce aux efforts du Secours populaire, elle pourra comme des dizaines d’autres femmes bangladaises, réaliser ce rêve. En 2007, le Secours populaire se tient aux côtés de GK quand il s’agit d’apporter une solidarité d’urgence aux sinistrés du cyclone Sidr : aides alimentaires, reconstruction de cinq écoles et achat de bateaux pour les pêcheurs ayant tout perdu.

Les réfugiés Rohingyas du « camp 23 »

De ces liens tissés durant près de vingt ans, l’année 2020 incarne une manière d’acmé. Outre le soutien à son action pour endiguer la pandémie, le SPF prête main forte à GK lors d’une autre urgence : celle des réfugiés Rohingyas. Il est des urgences qui durent comme il est des plaies qui ne cicatrisent pas : ainsi en va-t-il du sort des Rohingyas. Minorité musulmane discriminée et persécutée par le pouvoir birman depuis des décennies, celle-ci émigre massivement au Bangladesh pour venir peupler les nombreux camps installés près de la frontière. Les conditions de vie y sont extrêmement précaires. Ainsi, GK a conçu un programme destiné à améliorer la santé et l’hygiène des résidents d’un de ces nombreux camps, situés dans le district de Cox’s Bazar, à 1km du village reculé de Shamlapur où est installé un des centres de santé de GK. 

Le soutien du SPF, s’élevant à 25 000 €, permet aux professionnels de santé de GK (médecins, infirmières, psychologue, nutritionniste, physiothérapeute, pharmacien, etc.) et à son réseau de bénévoles de venir en aide à 4000 enfants et 1500 personnes âgées. Des consultations médicales et bilans de santé, des visites à domicile ainsi que des actions de prévention collectives sont menées de août à décembre 2020, auprès de ces populations, les plus vulnérables parmi les 11 000 réfugiés qui survivent dans le « camp 23 », regroupement de campements précaires et de bidonvilles, entrelacs de tôles, de bambou et de déchets plastiques.

Après le cyclone, faire renaître l’espoir

2020 se révèle l’année de toutes les urgences : pandémie de coronavirus, conditions sanitaires dramatiques pour les réfugiés Rohingyas et, donc, passage dévastateur du cyclone Amphan dans le golfe du Bengale. Sa violence inouïe ravage 26 districts des zones côtières bangladaises. Villes et villages inondés, infrastructures et habitations détruites, digues et routes emportées, cultures et élevages dévastés : c’est un paysage de désolation qu’Amphan laisse derrière lui. GK, très présente dans le Sud-Ouest du pays, voit nombre de ses programmes d’aide aux paysans pauvres de la région (assainissement et adduction d’eau, soutien au maraîchage, à la pisciculture et à l’aviculture) gravement impactés par le passage d’Amphan. 

Bangladesh : 2020, une année au coeur de la tempête

Ontora cultive son jardin, réhabilité après le passage du cyclone Amphan grâce aux efforts conjoints du Secours populaire et de son partenaire au Bangladesh, GK Savar – Décembre 2020. ©Munir Uz Zaman / SPF

 

Le SPF répond alors présent à l’appel de son partenaire et débloque un fonds de 15 000 € pour permettre à GK de relancer ces programmes et de faire, ainsi, renaître l’espoir pour des milliers de familles du territoire. Les efforts du SPF se portent sur la région des Sundarbans, grande forêt de mangrove, où les familles subsistent de maraîchage, de pêche ou d’élevage. Au regard de leur activité et à l’aune de l’ampleur de leurs pertes, chacune se voit remettre semences, alevins ou canards. 200 familles, déjà accompagnées par GK, peuvent ainsi redémarrer leur activité afin de subvenir elles-mêmes à leurs besoins. Des formations au maraîchage, à la conservation des semences ou à l’élevage sont également mises en œuvre. A cette occasion, comme toujours avec GK, une attention particulière est portée à la place des femmes.

Un développement en harmonie avec l’environnement

S’il concerne les familles qui ont perdu leurs moyens de subsistance, le projet de réhabilitation soutenu par le SPF concerne celles dont les maisons avaient été détruites. GK peut ainsi offrir à 70 familles, dans 14 villages, des couvertures de tôle afin qu’elles puissent avoir à nouveau – littéralement – un toit sur la tête. Et, pour ces familles, des formations sont dispensées afin que chacune puisse reconstruire sûrement son foyer. Des équipements collectifs – une école et un centre de santé – sont également remis en état. 

Bangladesh : 2020, une année au coeur de la tempête

Rubi, Juthi, Chaya et Binita puisent de l’eau au puits tubulaire. Détruit après le passage du cyclone Amphan en mai 2020, il a été réhabilité par GK Savar grâce aux fonds confiés par son partenaire, le Secours populaire – Décembre 2020. ©Munir Uz Zaman / SPF

 

Un travail important, enfin, est conduit par GK pour réhabiliter les circuits d’eau et leur assainissement. Des remblais de protection sont reconstruits, des puits remis en service, de nombreuses réserves d’eau douce salinisées sont pompées puis remplacées. Trois canaux, habituellement utilisés par 3500 fermiers de la zone, endommagés et obstrués par des débris d’arbres et des hyacinthes d’eau apportés par les crues, sont nettoyés. Pour l’occasion, GK fait appel à des travailleurs plongés dans la pauvreté par le confinement et qui peuvent ainsi toucher une rémunération – un « cash for work ». Et cultive ainsi, indéfectiblement, une solidarité qui met les humains à l’initiative de leur développement et en harmonie avec leur environnement.

Bangladesh : 2020, une année au coeur de la tempête

Komol Das cultive son jardin, réhabilité grâce au SPF, à l’aide d’un compost entièrement naturel : le vermicompost. Il a découvert cette technique lors d’une formation dispensée par GK Savar – Décembre 2020. ©Munir Uz Zaman / SPF

 

Don’actions : des moyens pour agir

Le Don’actions est la campagne de collecte du Secours populaire français. Les dons collectés nous donnent les moyens d’agir auprès des personnes en difficulté et de développer une solidarité de proximité en toute indépendance. Depuis 20 ans, le Don’actions apporte des fonds nécessaires au quotidien des antennes du Secours populaire.
Par exemple, il a permis d’acquérir à Reims une camionnette pour assurer une permanence mobile auprès des sans-abris. Ou à Cancon, dans le Lot-et-Garonne, il a permis d’acheter un réfrigérateur et un congélateur qui servent à stocker les produits frais distribués aux personnes accueillies.
Du 15 janvier au 25 mars 2021, les bénévoles vont redoubler d’initiatives et aller à la rencontre des donateurs et du public. Cette campagne a pour objectif de donner des moyens à l’association pour qu’elle puisse agir auprès des plus démunis. Nouveautés de l’édition 2021 : un dispositif digital et plus de 100 lots offerts par des personnalités.

Actions de réhabilitations suite au passage du cyclone Amphan dans le Sud Ouest du Bangladesh

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