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Fracture numérique : ouvrir des fenêtres sur le monde

Mis à jour le par Pierre Lemarchand
La fédération du Secours populaire de l'Isère a soutenu son partenaire palestinien Ma'an dans la mise ne place d'un laboratoire informatique dans l'école de Kaabneh, village de la vallée du Jourdain.

La fracture numérique est identifiée par les Nations unies comme un enjeu majeur pour la réalisation de son Agenda 2030 et son programme de développement durable. Avec ses partenaires sur la planète, le Secours populaire engage ses forces dans la bataille, afin que chacun puisse accéder à Internet et être ainsi respecté dans son droit à l’information et à la communication. Exemples : les projets liés à l’éducation et la formation conduits en Géorgie, en Équateur et en Palestine.

« Faire en sorte que tous les habitants de la planète aient accès à l’Internet et l’utilisent reste un défi qu’il nous faut relever si nous voulons que la communauté mondiale atteigne les Objectifs de développement durable (ODD) fixés par les Nations unies à l’horizon 2030 », lit-on sur le site de l’ITU (l’Union Internationale des Télécommunications), l’institution onusienne pour les technologies de l’information et de la communication. Or, aujourd’hui, près de la moitié de la population mondiale n’a pas accès à Internet. Cette fracture numérique, qui subsiste entre les pays, est liée au niveau de développement de ceux-ci : près de 87% des habitants des pays développés utilisaient Internet en 2019, contre 47 % dans les pays en développement​. 

Protéger le droit de chacun à communiquer, quels que soient son lieu et ses conditions de vie, est un enjeu fondamental, en particulier lorsque l’on défend un égal accès de tous à l’éducation et la formation. Et nombreux sont les projets conduits par les partenaires du Secours populaire sur la planète qui visent à réduire la fracture numérique et s’inscrivent en plein dans le quatrième objectif de développement durable posé par l’ONU : « Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie. »

En Géorgie, Educare s’engage auprès des lycéens

Dans les pays les plus pauvres, seul un lycéen sur dix a un accès à Internet, avance l’association Educare, partenaire de la fédération du Rhône du SPF en Géorgie, sur sa plateforme de collecte de fonds Giveinternet.org. En Géorgie, c’est un sur trois. Grâce au soutien du SPF, Educare a permis à des dizaines de jeunes Géorgiens pauvres de se doter, depuis 2018, d’un ordinateur portable et d’une connexion internet. Imaginé avant la pandémie, ce programme s’est révélé d’une pertinence accrue lorsque le confinement s’imposa au printemps 2020 et que les cours se dispensèrent à distance. 

Une étude d’impact, réalisée au printemps 2021 et concernant 1000 lycéens, dévoile que, un an après qu’ils ont bénéficié du programme d’Educare, un quart d’entre eux ont eu de meilleures notes et près de la moitié se déclarent moins anxieux quant à leur travail scolaire. 60% s’informent à présent via les sites de media en ligne. « Pendant des années, l’environnement dans lequel les jeunes grandissent ont conditionné leurs chances de réussir. Avec Internet, l’endroit où l’on vit n’est plus un obstacle. Internet crée un espace qui offre à chacun la possibilité de se développer, se cultiver, se passionner », s’enthousiasme George Jibladze, président d’Educare. 

« Quand nous sommes allés en Géorgie pour rencontrer notre partenaire et les élèves, nous nous sommes rendus compte de l’état de pauvreté du système éducatif public, se souvient Françoise Lorca, bénévole de la fédération du SPF du Rhône. Mais ce qui nous a frappés plus que tout était la motivation de ces jeunes à étudier. » Durant trois années, les lycéens soutenus par le SPF étaient originaires de Guria, région très rurale à l’est du pays. Educare leur a remis à chacun un ordinateur portable doté d’applications éducatives (enseignement à distance, préparation des examens, accès à des livres numériques, etc.) et, par le biais d’un tutorat, les a formés à la culture numérique et a aiguisé leur esprit critique face aux médias. 

En juin 2020, lors du premier confinement, Mariam confiait aux bénévoles du SPF : « Sans cet ordinateur, la connexion internet et les ressources en ligne, je n’aurais tout simplement pas pu suivre mes cours… ». Aujourd’hui, le SPF du Rhône concentre ses efforts sur la région de Karthlie et, au regard des besoins, a choisi d’augmenter son soutien à Educare – il y a tant de lycéens à aider, tant d’avenirs à construire encore.

La fracture numérique dans le monde

Mariam, ici avec ses deux petits frères, vient de recevoir un ordinateur portable de la part de la fédération du SPF du Rhône et de son partenaire en Géorgie Educare.

En Équateur, C-Condem aide les écoliers et des collégiens

Quand la pandémie mondiale, au printemps 2020, a conduit le gouvernement équatorien à fermer les écoles et préconiser un enseignement à distance, l’inquiétude a gagné les habitants du canton de Muisne, situé à l’ouest du pays, au bord de l’océan Pacifique. Comment faire, quand seuls 45% de sa population y possèdent un téléphone mobile, 15% un ordinateur et 5% une connexion internet ? Le SPF et son partenaire en Équateur, C-Condem, ont alors imaginé un programme d’aide aux écoliers et collégiens de familles monoparentales très modestes de pêcheurs et cueilleurs des mangroves. 

Afin de favoriser l’accès à l’éducation en ligne et maintenir leur lien avec l’école, C-Condem a fourni à ces enfants un ordinateur ainsi qu’une connexion. Sans ce programme, il aurait été impossible pour ces familles, démunies de tout, d’accompagner leurs enfants dans leurs apprentissages. En même temps que les ordinateurs sont apportés au sein des foyers, une formation à leur utilisation ainsi qu’aux plateformes éducatives est prodiguée. Chaque ordinateur est mutualisé au sein du quartier et profite ainsi, par le jeu d’une solidarité décuplée, à d’autres enfants de familles pauvres. 

Mayra Carrasco est cueilleuse de crabes depuis qu’elle est enfant. « Je ne connais pas d’autre vie que celle que j’ai vécue dans la mangrove, témoigne-t-elle. Je n’ai pas suivi d’études. Mes parents, mes frères, mes tantes et mes oncles, mes grands-parents ont passé leur vie à pêcher le crabe. Mes filles, elles aussi, vont ramasser du crabe, mais elles vont aussi à l’école et au collège, car je veux qu’elles aient d’autres choix, même si nous ne devons jamais oublier la mangrove. La cueillette du crabe ne suffit plus aujourd’hui pour vivre et cela me désespère. Je sais que ce sera pire pour mes filles. C’est pourquoi l’ordinateur que nous a donné C-Condem nous a tous rendus très heureux dans la famille. En plus, les cousins ​​de ma fille Melina viennent aussi et nous étudions tous ensemble ! » 

C-Condem, dans la foulée de ce projet, accompagne les familles de Muisne dans leur démarche envers les gouvernements central et provincial pour que soit développé dans le canton le réseau Internet. A cette occasion, les communautés pourront rappeler aux autorités équatoriennes que l’accès à Internet est un droit fondamental reconnu par les Nations Unies depuis 2012…

La fracture numérique dans le monde

Mayra et sa fille, devant l’ordinateur que leur a offert C-Condem, l’association partenaire du SPF en Equateur.

En Palestine, Natuf et Ma’an sont solidaires de la jeunesse

« Depuis le blocus de 2008, Gaza est une prison à ciel ouvert. Les habitants y meurent à petit feu, lâche Mahjoub Selmi, bénévole à la fédération de l’Isère du SPF. Notre partenaire, Natuf, nous confie souvent que les projets que nous conduisons ensemble sont leurs seules fenêtres ouvertes vers l’extérieur. » Ces projets consistent en la création de coopératives permettant à des Gazaouis diplômés d’accéder à l’emploi, dans cette bande de terre de 400 km2 et 1, 5 millions d’habitants – la plus forte densité de population au monde. Le chômage y touche plus de 60% des actifs : « C’est un projet qui vise à combattre le chômage galopant des jeunes diplômés et soutenir les femmes veuves qui ont perdu leurs maris lors des affrontements, pour les accompagner dans le marché du travail, dans une démarche d’économie solidaire », poursuit Mahjoub, qui coordonne le projet. 

Chaque année, cinq coopératives sont ainsi créées, mobilisant chacune dix personnes et mettant en place des activités en adéquation avec les besoins du marché local, tels le soutien scolaire, le design d’intérieur ou le développement numérique. Cette dernière coopérative a permis, en 2020, à dix jeunes gens de se spécialiser dans la réparation d’ordinateurs, l’intervention sur réseau informatique, le travail de webmaster et les technologies de communication. De quoi ouvrir, dans le ciel de Gaza, une multitudes de fenêtres sur le monde.

Le village de Kaabneh se niche dans la vallée du Jourdain, en Cisjordanie, au nord-ouest de Jéricho. Là se trouve une école mixte où 80 enfants, entre 6 et 14 ans, sont scolarisés. Certains parcourent des kilomètres à pied pour s’y rendre. Comme toutes les écoles de la vallée, elle dispose d’un budget très limité. Depuis plusieurs années, elle est soutenue par l’association palestinienne Ma’an : de la fourniture de papier pour écrire à des stores pour les fenêtres, jusqu’à la construction de deux salles supplémentaires, l’engagement de Ma’an est total. Grâce au soutien de la fédération du SPF de l’Isère, Ma’an a mis en place, à la fin de l’année 2020, un laboratoire informatique, comprenant treize ordinateurs en réseau, des tables et des chaises. « L’objectif de ce projet est de familiariser les enfants avec l’outil informatique et de leur permettre d’utiliser les supports pédagogiques du gouvernement palestinien », éclaire Christophe Masse, bénévole au sein de la fédération et coordinateur du projet.       

Le président de Ma’an témoigne : « Lors de l’installation et de la première utilisation des ordinateurs, une fillette a exprimé joyeusement ses émotions en demandant si ces ordinateurs étaient tous pour les enfants ! Pour beaucoup d’élèves, c’est la première fois qu’ils touchaient un ordinateur, sentaient qu’une technologie était entre leurs mains ; toucher le clavier et regarder comment l’écran réagit. » Le SPF et Ma’an ont également rénové le système de panneaux solaires alimentant le laboratoire ; ainsi, les enfants de Kaabneh pourront pratiquer à loisir. Et, qui sait, faire de la vallée du Jourdain la Silicon Valley de demain !

La fracture numérique dans le monde

Le laboratoire de l’école de Kaabneh, mis en place par l’association palestinienne Ma’an avec le soutien du SPF de l’Isère, peut accueillir une quinzaine d’élèves.

 


En Afrique aussi, le SPF s’engage pour réduire la fracture numérique !

Au Burkina Faso, les fédérations du territoire de Belfort, des Landes et de la Haute-Saône, avec leur partenaire ALEUME, accompagnent les enfants et étudiants de Ouagadougou dans leur scolarité. Entre autres nombreuses actions, ont été mises en place des formations informatiques pour les étudiants.

A Madagascar, les fédérations de la région Auvergne-Rhône-Alpes soutiennent l’association Fifa Nampiana Malagasy dans ses actions éducatives. Au sein d’un programme d’accompagnement global (santé, scolarité, sécurité alimentaire et activités génératrices de revenus), concernant trois écoles réparties sur l’île, un achat d’ordinateurs a été opéré sur l’école d’Antananarivo.

Au Mali, la fédération du Loiret a financé la construction et l’équipement d’une salle informatique dans le Centre de formation technique et professionnelle de Kimparana. Outre pour les éléves eux-mêmes, des intiations et formations à l’informatique sont dispensées pour les jeunes de toutes les communes rurales avoisinantes ; cette salle informatique est la première et la seule sur toute la zone de Kimparana !

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