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Marie-France et Samia comptent les jours jusqu’aux vacances

Mis à jour le par Olivier Vilain
Marie-France et sa fille Shalabila vont partir en vacances, avec le reste de la famille, pour la première fois depuis 10 ans. Elles pensent tous les jours à ce qu'elles feront en bord de mer cet été.

La campagne vacances du Secours populaire est attendue par les familles de Samia et celle de Marie-France, qui vivent au Puy-en-Velay (Haute-Loire). Samia en a besoin après le décès de son mari. Quant à Marie-France, elle n'a pas eu de vacances depuis qu'elle a quitté l'île de la Réunion, pour trouver du travail, il y a plus de dix ans. Elles attendent de pouvoir passer des moments de joie en famille. Nicole, elle, n'a pas besoin de partir loin pour se sentir dépaysée. « Ce qui me plait le plus, c’est de voir les personnes qui m’entourent heureuses. » REPORTAGE.

Venue de sa Réunion natale avec ses trois filles, son fils et son mari, Marie-France se rend au Secours populaire depuis leur arrivée au Puy-en-Velay, il y a « deux ou trois ans ». A 53 ans, cette femme dynamique cherche à travailler comme vendeuse en magasin, caissière en supermarché ou même comme femme de ménage, mais « trouver du travail, quand on a un handicap, c’est compliqué ». Son mari est employé comme jardinier, mais « c’est toujours des contrats courts. »

Elle vient régulièrement voir les bénévoles, comme Suzanne Romand, secrétaire générale du Secours populaire en Haute-Loire, ou Odette, deux retraitées énergiques, dont l’écoute est ponctuée de sourires. Auprès d’elles, Marie-France et sa fille de 23 ans, Shalabila, obtiennent « de quoi manger et des conseils pour chercher un emploi ou partir en vacances. » Cette année, Odette, qui est la responsable des vacances, a proposé de les emmener, en juillet, dans une résidence Cap Vacances en pension complète à Saint-Pierre-la-Mer, entre Béziers et Narbonne.

Vue sur la Méditerranée

« J’ai sauté sur l’occasion, se rappelle Marie-France en riant. Ce seront nos premières vacances en dix ans. Le bord de la mer, c’est ce qui me manque le plus par rapport à la Réunion. » Dans le commerce, ce séjour coûte environ 400 euros par adulte. Avec l’apport des chèques-vacances et la participation financière assurée par le Secours populaire, le coût à la charge des familles tombe à 70 euros par adulte. « Sans aide, on ne peut pas s’offrir de vacances », calcule rapidement Marie-France. C’est encore une grosse somme quand les revenus de la famille ne s’appuient que sur les aides sociales – RSA, allocations familiales et allocation aux adultes handicapés.

« Heureusement, ici, on paie en plusieurs fois, sinon, ce serait impossible », intervient Samia, 39 ans. Elle élève seule ses cinq enfants, âgés de 6 à 18 ans, depuis le décès de son mari. Elle est partie l’année dernière à la Grande-Motte (Hérault) avec le Secours populaire. « C’était magnifique. Depuis, mes enfants me disent tous les jours ‘‘quand est-ce qu’on y retourne, maman’’ ? » C’est pour cette raison qu’Odette et Suzanne ont une procédure bien rodée. Lors de la première inscription au séjour, en plus de donner des conseils pratiques et de montrer une carte du lieu de villégiature, elles mettent en place un échéancier pour aider les familles. En général, les futurs vacanciers apportent au Secours populaire entre 20 et 50 euros par mois de janvier à juillet. De quoi répartir l’effort. « On se revoit régulièrement durant cette période et s’arrange toujours, s’il y a besoin », dédramatise Odette.

Pour Samia et ses quatre enfants, les vacances s'imposent. Elles ont besoin de se retrouver et de changer d'air. La mère de famille garde toujours sur elle les photos de son séjour de l'été dernier.

Pour Samia et ses quatre enfants, les vacances s’imposent. Elles ont besoin de se retrouver et de changer d’air. La mère de famille garde toujours sur elle les photos de son séjour de l’été dernier.


« On gère le budget de façon encore plus stricte que d’habitude durant ces mois-là. On met de côté pour partir et aussi pour se faire sur place de petits plaisirs », indique Marie-France. De quoi ramener des souvenirs. Samia abonde : « Oui, on met de côté, petit à petit, de quoi offrir des glaces aux enfants, des gaufres ; c’est les vacances quand même ! », s’amuse-t-elle. Tout le monde rigole.

Samia montre à Shalabila et à sa mère des photos de l’été dernier en bord de mer : « Là, c’est la première fois que je suis entrée dans un sauna et là c’était aussi une première dans un jacuzzi ! » Parmi les bulles, un grand visage souriant se détache. « Ce que j’ai préféré, c’est de n’avoir rien à faire, pas de tâches ménagères, profiter de mes enfants, penser à moi et me faire belle. » Grand événement, Samia s’est maquillée, « alors qu’ici je n’y pense jamais » ; trop occupée. Elle a gardé des contacts avec d’autres mères de famille, « on s’appelle, on va manger au parc maintenant ». Une perspective qui fait envie à Marie-France, qui se sent très isolée depuis son arrivée dans la ville. « Bientôt, nos valises seront prêtes, avec les maillots de bain, la crème solaire, de quoi faire des randonnées. »

Penser à soi

Nicole, 62 ans et « retraitée en juin », n’a pas fait ce choix. La Méditerranée, les groupes, très peu pour elle. « Cet été, je pars au camping de Langeac, à 30 minutes de Brioude », là où elle vit depuis une dizaine d’année, au nord du département. Elle y retrouvera son fils, sa belle-fille et son petit-fils. « Chez moi, je n’ai ni balcon ni jardin, donc j’aime sortir, j’aime la nature, et en profiter en famille c’est encore mieux. » Elle sera dans un chalet en face de l’Allier et savoure à l’avance le bruit de la rivière, « voir cette eau couler et les enfants y mettre les pieds. Dès qu’il fait beau, il leur faut de l’eau », s’amuse-t-elle.

Ces départs en camping ont commencé à l’été 2020, après le premier confinement. Dominique, bénévole à Brioude, lui a proposé de passer une semaine au camping La Bageasse « dans des petits chalets super mignons », à 3 kilomètres de chez elle. « Même si on ne part pas loin, on ressent ce dépaysement. On oublie les problèmes. Il suffit de voir mon petit-fils courir partout, vivre dehors. » C’est vrai que la vie a été difficile pour cette ancienne secrétaire, désormais séparée, qui n’a pas connu de contrat de long durée depuis plus de dix ans. « On oublie en particulier toute la pression pour prouver sans cesse qu’on fait suffisamment de recherches d’emplois, la peur d’être radié et de ne pas percevoir ses allocations chômage pendant plusieurs mois. »


Ce qui me plait le plus, c’est de voir les personnes qui m’entourent heureuses.

Nicole, 62 ans, adepte du camping dans son département


Elle a noué des liens forts avec les bénévoles de sa commune, comme Dominique. « Il sont toujours à l’écoute. Jamais de jugement, toujours prêts à aider. » En 2021, elle est repartie dans un autre camping, à Champagnac, toujours à quelques kilomètres de chez elle. Toujours en famille. « Ce qui me plait le plus, c’est de voir les personnes qui m’entourent heureuses. » Avant ces départs en camping, elle n’avait pas été en vacances depuis plus de dix ans. Comme Samia et Marie-France, Nicole compte les jours qui la sépare de son prochain séjour.

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