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En Creuse, des réfugiés bâtissent pour l’avenir

Mis à jour le par import
Ousmane et Jean-Jacques, deux demandeurs d'asile particulièrement investis dans le chantier participatif du Secours populaire de Guéret, où ils se rendaient presque chaque jour pendant toute la durée des travaux.

À Guéret, un chantier participatif associant artisans et demandeurs d'asile a permis d'agrandir les locaux du Secours populaire. Une expérience bénéfique qui a amélioré l'accueil des personnes aidées et favorisé l'intégration des demandeurs d'asile dans la vie locale.

Les murs blancs exhalent encore l’odeur de peinture fraîche. Jean-Jacques et Ousmane nous ouvrent la porte des lieux comme ils feraient le tour du propriétaire. Et pour cause : les deux jeunes demandeurs d’asile ont contribué à bâtir cette extension des locaux du Secours populaire de Guéret (Creuse). Ousmane, Guinéen de 20 ans, serre dans sa main la photocopie d’un article du quotidien local, où est relatée l’épopée de ce chantier participatif qui a permis, en trois mois, de faire surgir de terre cet espace de 100 m2 (quatre salles de classe et un bureau).

Sur la photo, le jeune homme pose tête haute aux côtés de ses camarades et de Philippe, le maire d’une petite commune voisine. Ce dernier s’est attelé aux complexes dossiers administratifs et obtenu de l’Union européenne un financement à hauteur de 80 % ; c’est aussi lui qui a déniché un réseau d’artisans et de professionnels prêts à travailler pour un chantier participatif, lui enfin qui a dirigé les travaux en chef de chantier.

Migrants de Calais

« Nous avions clairement besoin de nous agrandir, en particulier pour accueillir les demandeurs d’asile dont le nombre a augmenté avec l’ouverture d’un CAO (Centre d’accueil et d’orientation, ndlr) et l’arrivée des migrants de Calais en 2015 », explique Lucile Periot, la secrétaire générale du Secours populaire dans la Creuse.

La motivation et l’enthousiasme d’Ousmane, de Jean-Jacques et de leurs camarades a fait le reste.

« C’est la première fois que je construis une maison », raconte Ousmane qui garde en mémoire le plaisir de l’ouvrage collectif et la satisfaction d’avoir apporté ses propres idées et sa propre vision sur les plans et les travaux. Son ambition est de suivre une formation professionnelle dans le domaine de la construction. Un rêve suspendu à la décision de l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et des apatrides) de lui accorder un statut qui le sortirait enfin de cette inactivité forcée.

Jean-Jacques, un Congolais de 39 ans, a déjà travaillé dans la construction par le passé mais il a pu, à la faveur de ce chantier, « découvrir l’usage de nouveaux matériaux, comme le placo ». Des connaissances qu’il a également hâte de mettre en pratique dès que sa situation administrative lui permettra de travailler.

Des locaux pour les cours de français

Des soubassements à l’isolation, en passant par les charpentes et l’éléctricité, les demandeurs d’asile ont contribué, étapes après étapes, à donner corps à ce vaste espace, qui les accueille désormais lors des cours de FLE (Français Langue étrangère), chaque lundi après-midi.

Dans la cuisine ouverte sur la salle d’accueil, les enseignants de français, tous bénévoles, sont arrivés : Michel, Marthe, Sylvain, Marie-Noëlle, André, échangent quelques mots autour de Martine.

Cette infirmière à la retraite est la coordinatrice des cours de français. Mais, à la chaleur et à la gaieté des retrouvailles avec les demandeurs d’asile, on devine que sa place en ces lieux excède sa mission.

Cette affection, c’est tout ce que je peux leur donner. Je pense qu’à force de donner de l’amour, ça finira bien par déteindre aussi sur les autres et leur donner envie de faire pareil. Le contexte mondial fera de toutes façons qu’il y aura de plus en plus de demandeurs d’asile, alors autant trouver tout de suite des solutions humaines,

analyse l’alerte sexagénaire en disposant sur la table de la cuisine les clémentines et biscuits apportés avec elle pour les demandeurs d’asile qui « bien souvent viennent étudier le ventre vide ».

Rêves suspendus

Avec Martine, générosité et tendresse s’imposent là, sans bavardage, comme une évidence. Avec les autres bénévoles du SPF, elle est pour les exilés comme une lumière imperturbable dans la nuit d’un quotidien fait d’insécurité, d’usure dans l’attente, de rêves suspendus à un titre de séjour, seul capable d’ouvrir enfin l’horizon d’une vie normale.

À la fin des cours arrive Ali, un jeune Soudanais, frêle silhouette et sourire triste. « Il ne va pas bien », souffle Lucille. Le jeune homme vient de recevoir une réponse négative de l’Ofpra. Tous ses camarades arrivés de Calais à la même époque ont obtenu leur titre de séjour. Pas lui.  Marthe, une des enseignantes, s’approche. Ce soir, Ali ne sera pas seul et dormira dans un foyer chaleureux.

 
 

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