De jeunes chinois invités à un match de basket féminin

Un groupe de quatorze jeunes Chinois, leurs huit accompagnateurs, cinq jeunes belges et treize Français a découvert les Jeux de Paris, lors d’un match de basket féminin à Lille opposant le Nigeria et l’Australie : ambiance festive et dépaysement garantis !

par Laurent Lefèvre

Tous les membres de la délégation chinoise découvrent la France, y compris les deux traductrices et les accompagnatrices. Pour les garçons, originaires d’un comté rural de la province du Guizhou (sud-ouest montagneux et isolé de la Chine), c’est la première fois qu’ils sortent de leur pays : ils n’avaient dans leur vie fait qu’un voyage à l’occasion d’un match de foot à Shanghai. Futur étudiant, ancien soldat, patron de restaurant, professeur, marchand…, ces footballeurs amateurs sont issus d’une minorité ethnique. Âgés de 19 à 32 ans, ils se retrouvent dans la lumière des JO, plongés dans un autre monde incubateur et révélateur de contrastes culturels.

« Ce temps de partage international autour du basket féminin vise à nouer des liens à travers le langage universel du sport », précise Julien Villain, membre du Comité national du Secours populaire. En effet, les membres de ce petit groupe issus de trois pays différents ont partagé les mêmes enthousiasmes, se sont découverts — loin des stéréotypes — sans parler la même langue. Ils ont même, comme prévu, commencé à faire émerger des idées pour faire vivre la solidarité à travers le vecteur du sport.

L’important, c’est d’y participer

Dans l’allée qui mène au stade, différentes nationalités se croisent et se sourient. Ici, le plaisir de participer à l’événement s’exprime en anglais, mandarin, flamand et français. Comme ce couple d’Australiens qui repart du stand maquillage avec un dessin de leur drapeau sur chaque joue, les spectateurs affichent leurs couleurs dans la bonne humeur.

Incarnées par des comédiens-danseurs qui ont répété les gestes et les pas à exécuter sous leur costume de 6,5 kg, Ollie et Para, les deux mascottes des JO en forme de bonnet phrygien, accueillent la foule qui déambule tranquillement vers le stade sous le soleil nordiste. Dès qu’elles aperçoivent l’une de ces mascottes, les jeunes danseuses chinoises se précipitent dans sa direction, l’entourent et l’enlacent. Téléphone portable à la main ou en bandoulière, elles se livrent au jeu des selfies avec ce symbole des Jeux de Paris. Soigneusement maquillées pour assister au match, certaines portent leur tenue traditionnelle de danseuse conçue sur-mesure qu’elles conserveront tout au long de leur carrière.

Âgées de 20 à 30 ans, elles suivent les cours de l’Académie de l’opéra traditionnel chinois de Pékin rattachée à l’Opéra de Pékin, qui forme l’élite des danseurs et musiciens de cet art complet – chant, danse, musique, acrobatie, arts martiaux… Dans un enthousiasme communicatif, elles sont rejointes par leurs compatriotes et les jeunes belges pour une inoubliable et unique photo de groupe avec la mascotte.

Une ferveur électrique dans un écrin de discothèque

Le contraste entre l’extérieur ensoleillé et les tribunes bien remplies du stade Pierre-Mauroy plongées dans le noir et éclairées par les sunlights est saisissant : toit fermé, cette enceinte de football divisée en deux accueille pendant les JO les préliminaires de basket et les phases finales de handball.

À peine installé dans les rangées supérieures en face de l’écran vidéo rectangulaire, chacun est immédiatement immergé dans l’ambiance. « Are you ready? », lancent les speakers français et américain. Après l’arrivée triomphale des deux équipes qui ont descendu une passerelle telles des gladiateurs rejoignant l’arène, la présentation des joueuses sous les acclamations et les hymnes officiels, la partie débute à 11 h comme prévu. Très serrée, la rencontre est rythmée : pas de temps morts pour les spectateurs, qui lors des courtes pauses se livrent à un concours de décibels, reprennent en chœur des tubes ou assistent à une démonstration d’Antoine Jehanne, basketteur freestyle, qui assure le show. Malgré un retour de l’Australie, les Nigérianes créent la surprise en l’emportant 75 à 62 et célèbrent cette victoire, leur deuxième aux JO en trois participations, comme si elles avaient remporté la compétition.

« L’esprit du basket ressemble à celui du football : c’est la solidarité ! », résume, à la sortie du match, Lujinfu, futur étudiant de 19 ans, le cadet de la délégation chinoise. « Ils sont très contents : ils ont apprécié l’ambiance. C’est la fête ! », souligne dans un français parfait Jiao Sun, l’une des traductrices, chargée de mission de l’Association du peuple chinois pour l’amitié avec l’étranger, un partenaire du Secours populaire depuis 2007 – en février dernier, une trentaine de jeunes de 16 fédérations s’est rendue en Chine pour découvrir leurs sites olympiques, participer à des rencontres sportives et faire avancer un projet d’organisation de matchs solidaires. Plus largement, avec ces deux séjours et les échanges permanents, l’année aura été très active et débouchera sur la mise en place de projets solidaires en 2025. Le partenariat avec l’Association du peuple chinois pour l’amitié avec l’étranger a déjà permis d’organiser le premier village Copain du Monde en Chine, à Wuhan, en juillet dernier.

« D’incroyables moments de vie »

Après la rencontre, les jeunes belges et chinois ont visité le village « Copain du Monde » de Gravelines (Nord) où ils ont été accueillis par une trentaine d’enfants sahraouis qui y séjournent cet été – invités depuis plusieurs années dans ce village, ces enfants et leurs familles vivent toute l’année dans des camps de réfugiés. Dans l’après-midi, ils ont découvert, en barque et en train touristique conduit par un bénévole Gravelines, une cité en étoile fortifiée par Vauban dotée de remparts entièrement entourés d’eau. Ils ont ensuite été reçus à l’hôtel de ville par le maire.

Le soir, ils ont partagé un couscous préparé par les femmes sahraouies. « Entre ce magnifique repas et les spectacles donnés par les enfants sahraouis et les danseuses de l’opéra de Pékin en costumes traditionnels, j’ai surpris des moments de vie incroyables comme cette partie de ping-pong entre une jeune sahraouie et un Chinois très grand : ils rigolaient et s’éclataient », relate Christian Lampin, secrétaire national du Secours populaire. « Cette image furtive résume l’esprit de ce village : un choc d’humanité forte entre des personnes de cultures et d’horizons différents. »