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Rencontres avec 5 artistes solidaires au Solid’art 2023

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Les bénévoles du Secours populaire de l'Hérault ont interviewé 5 artistes solidaires qui ont exposé leurs oeuvres à l'occasion du Solid'Art 2023 au Zénith de Montpellier. Au travers de ces récits vous découvrirez Franck NOTO, Sandrot, Aurélie Salvaing, Romain Kulczycki et Fatoumata Diabaté.

Rencontre avec Franck NOTO

Franck NOTO, parrain de l’édition 2023 de Solid’art, a su toucher les bénévoles de part son humilité et son engagement auprès des enfants et des jeunes.

Pour Franck NOTO, le dessin est sa passion, depuis son plus jeune âge, qu’il pratique en autodidacte (il n’a suivi aucune école d’art), en se faisant ses propres armes par la découverte, l’apprentissage des techniques dans un travail constant. Il a fait beaucoup de figuratif, des portraits, de la calligraphie, de la BD…Dès qu’il a pu maîtriser ces techniques, il a pu créer, d’abord en solitaire, en individuel, puis, pour le graffiti dans un cadre collectif, avec des voyages à l’étranger. Il est ensuite revenu à l’atelier pour plus de réflexion que d’action, ce qui lui correspond plus aujourd’hui.

Il a longtemps et beaucoup fait du figuratif, qui s’est peu à peu déstructurer pour déboucher sur l’abstrait dans lequel il a éprouvé plus de liberté en donnant la primauté à l’émotion, à l’énergie. Ses influences ne sont pas nécessairement dans l’art, mais dans les rencontres, dans les échanges. Il a, avec son épouse, mis en place à Montpellier un atelier partagé, et il se nourrit plus de l’énergie des gens que de la peinture elle-même. Pendant 25 ans, il a eu envie de peindre tous les murs, mais aujourd’hui, le travail en atelier lui permet une réflexion plus étendue et plus profonde.

C’est sa première participation officielle à Solid’Art, mais il y vient depuis le début pour soutenir le Secours populaire, par le biais également de son association qui fait de la médiation. Il y vient notamment pour rencontrer de jeunes artistes qui savent très bien faire leur chemin, partager, échanger, avec une énergie tout à fait nouvelle, inédite. On a tous quelque chose à apporter aux autres et les autres ont tous à nous apporter quelque chose, ce qui crée une saine émulation, une excellente synergie.

En tant que parrain, il n’est pas là pour se mettre en avant, mais pour mettre en avant le Secours populaire. Il offre chaque année à des associations quatre ou cinq de ses œuvres, toujours au profit des enfants, qui sont notre avenir. Il est venu en toute humilité en appréciant pleinement l’occasion qu’on lui a fourni de participer à cette grande cause de l’enfance à aider, et il en est très heureux.

Rencontre avec Sandrot

Sandrot, jeune artiste peintre contemporaine et plus particulièrement animalière, a offert une performance live au Solid’art 2023 de Montpellier, qui a donné naissance à un magnifique colibri.

Elle a commencé dès l’âge de 5 ans à dessiner, notamment des animaux, à répétition. A 12 ans, elle peint une grenouille de 2 mètres de haut sur la porte des toilettes de ses parents. Puis elle dessine et peint beaucoup de portraits, des visages, des regards pendant plus de 10 ans, au cours desquels elle passe à Marseille un Bac Techno Arts appliqués, avec beaucoup d’architecture, puis à Lyon un Master de restauration d’œuvres d’art, Master arrêté au bout de trois ans pour tenter de créer ses propres œuvres, tenter de les vendre, tenter d’en vivre. Les débuts sont durs, dans les foires, les marchés artisanaux, dans la rue : personne ne veut acheter ses petits formats, ses magnets, et elle y perd toutes ses économies. Elle a dû alors prendre un emploi chez Lapeyre pendant 3 ans comme vendeuse de cuisines et salles de bains, et bizarrement elle s’y est régalée et a appris énormément de choses, notamment sur le contact humain, l’échange avec les gens, le rapport aux prix… Et puis, vers 24-25 ans, elle a tout plaqué pour reprendre la peinture : la reprise a été difficile, longue, mais progressivement elle a pu tirer un revenu de ses créations.

Au départ, elle faisait des portraits à partir de photographies qu’elle recopiait très fidèlement, mais il n’y avait vraiment que les animaux qui l’inspiraient. Elle a pourtant tout essayé, du portrait, du nu, des paysages, des voitures, mais c’était vraiment les animaux qui lui ont permis, en revenant aux sujets de son enfance, de trouver sa patte. Elle travaille principalement en atelier et de temps en temps réalise une performance. Mais l’atelier reste principalement la source d’inspiration et de travail, ce qui la nourrit pour pouvoir de temps en temps faire des performances en réalisant en deux heures une toile devant un public.

Le choix des animaux se fait par périodes : grands singes, félins et maintenant les oiseaux qui l’inspirent actuellement le plus. Elle vient de réaliser un hibou de 2 mètres de haut pour Solid’art au Carreau du Temple à Paris, hibou qui va aller pour quelques mois au Musée d’histoire naturelle de Marseille. Mais les grenouilles reviennent toujours, il y en a toujours une qui ressort régulièrement.

C’est sa deuxième année avec Solid’art à Montpellier l’année dernière, puis Paris, de nouveau Montpellier et en juin prochain Lille. L’art a la vertu de rassembler, d’apporter beaucoup de positif et de bien par l’émotion : elle est très heureuse de pouvoir participer à cela.

Rencontre avec Aurélie Salvaing

Aurélie Salvaing, très touchée par la dimension éthique de Solid’art, y a participé pour la 3e fois.

Aurélie Salvaing dessine des portraits sur un fond de texte écrit. Elle était juriste, mais est devenue, en autodidacte, dessinatrice. Elle a toujours dessiné, beaucoup dessiné, encouragée par ses parents. Après être tombée sur un livre qui partait au pilon, elle a commencé à faire le portrait de ses collègues juristes et s’est ensuite spécialisée dans le portrait sur papier comportant un texte écrit, ce qui crée un palimpseste. Elle tente ainsi de sous-titrer les âmes, d’atteindre une profondeur au-delà du dessin d’un visage. Ses modèles peuvent être des personnes de son entourage ou de rencontre, avec un penchant pour les adolescents, êtres en devenir, pour qui le rapport entre le portrait et le texte crée une sorte de puzzle.

Ce qui importe est le dialogue entre le dessin et le texte. Le choix de ce dernier est le plus souvent totalement aléatoire, sauf quand il s’agit d’une commande, comme dans son travail avec des entreprises telles que le CNRS, l’EHESS ou encore des paysagistes, des brasseurs, où le texte se rapporte au travail, aux métiers…

Aurélie Salvaing est très sensible à la cause des enfants et très touchée par la dimension éthique de Solid’art (auquel elle participe pour la 3ème fois) que ce soit envers les artistes ou les enfants, le tout dans une ambiance des plus agréables et où les échanges avec les autres artistes, avec le public, avec les bénévoles sont très enrichissants.

Rencontre avec Romain Kulczycki

Romain Kulczycki, artiste photographe, a parcouru de nombreux kilomètres au service de sa passion.

Ce jeune photographe est originaire de Lille, et habite Arles depuis trois ans. Il a d’abord fait des études de sociologie et a débuté comme instituteur. La photo n’est venue que petit à petit. Il a arrêté l’enseignement en 2018 pour partir à Milan faire un Master de photo avant de se lancer en free-lance. Mais le COVID est arrivé et il est rentré en France.

Il a commencé la photo en amateur autodidacte, mais après 5 ou 6 ans de pratique, il a ressenti le besoin d’une formation pour s’émanciper, savoir défendre son discours, acquérir une identité visuelle et artistique assumée.

Il nous présente deux de ses trois projets. Le plus récent a eu lieu au Costa Rica dans les jungles. Pour les salons-expos, il a tendance à enlever les portraits, que les gens n’achètent pas pour décorer leur intérieur, et privilégier les paysages pris ici au flash la nuit.

Auparavant, c’était la Chine en 2019 juste avant le COVID, où il est parti un mois en allant à pied de la côte vers l’Est en direction des pans épars, parfois très difficiles d’accès, de la Grande Muraille. Pour lui, pratiques de la marche et de la photographie vont de pair. Il y a quatre projets dans le projet « Chine ». Il y a les images de type documentaire sur l’iconographie (la façon de représenter) de la Grande Muraille. Il y a plus classiquement de la photo de paysage dans un gris peu contrasté de façon à éviter le passéisme, il y a des portraits pris plus ou moins à la sauvette et qu’il présente ici montés avec d’autres éléments, et enfin il y a les photos de nuit et la street-photo. Les quatre n’étaient faciles à articuler, c’est ce qui a rendu compliqué le projet d’ensemble.

Ce n’est pas un fétichiste des appareils et de la technique. Plus un appareil est léger, meilleur il est. Il travaille aussi bien avec un Canon qu’avec un Hybride Sony.

Il a déjà participé à Solid’Art à Lille, Marseille, Montpellier, Paris. Il est sensible au bénévolat qu’il a aussi pratiqué plus tôt, notamment dans « la jungle » de Calais, et pour lui bénévolat, voyage et altérité sont intimement associés.

Rencontre avec Fatoumata Diabaté

Fatoumata Diabaté, photographe d’origine malienne, a participé pour la première fois à la sixième édition du Solid’Art. Les bénévoles du Secours populaire ont apprécié découvrir sa personnalité et son engagement à travers son travail.

Fatoumata Diabaté est une photographe d’origine malienne. Dans sa culture, il n’est pas aisé de parler de soi : « ce sont d’ordinaire les griots, qui connaissent les origines de votre famille, votre parcours, votre personnalité, qui parlent de vous », mais elle accepte volontiers l’exercice. Elle s’est installée à Montpellier en 2016 et répartit son travail entre le Mali et la France. Ses œuvres sont aussi exposées en ce moment en Angleterre. Son travail a été récompensé par de nombreux prix comme en 2005 et 2013.

Elle s’est formée d’abord au Mali, à travers deux structures, Promo Femmes et le Centre professionnel, pendant trois ans, complétés ensuite par des stages. Dans un milieu au départ très masculin, comme elle considère qu’aucun métier n’a un sexe et comme elle sait ce qu’elle veut, qu’elle est à la fois déterminée et passionnée, elle a par exemple, dès ses années d’étude, appris à faire connaître son travail et à vendre ses clichés. Elle admire Diane Arbus, Cartier Bresson pour son travail de spontanéité, en temps réel, et bien d’autres.

En raison de ce qu’elle juge être une perte de valeurs en cours dans les formes modernes du développement, elle s’intéresse aux sujets sociaux et puise son inspiration d’une part dans les contes africains, qui sont transmis oralement, qui forment comme des promesses qui restent, et dont les leçons morales sont importantes, et d’autre part dans les masques : les personnes qu’elle photographie élisent un conte de leur choix et fabriquent un masque qui leur semble correspondre.

C’est sa première participation à Solid’Art, et elle souhaite vivement pouvoir revenir pour les prochaines éditions. En tant que femme et que mère, elle trouve fondamental d’aider les gens et en priorité les enfants, qui au Mali appartiennent à tous et où il faut tout un village pour éduquer un enfant. Si on en voit un à la peine, on lui vient aussitôt en aide et si un autre fait une bêtise, on le corrige tout aussitôt.

Philem et Marc, bénévoles de la fédération du Secours populaire de l’Hérault

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